Une fiche Google My Business constitue un traitement de données à caractère personnel soumis au RGPD.
La décision rendue est très claire : une fiche professionnelle peut être soumise au RGPD dès lors qu'elle permet d'identifier une personne. Contrairement à ce qu'affirmait Google, le fait que Mme [C] exerce son activité via une société (une SELARL) ne change rien : son nom, prénom, métier et coordonnées suffisent à la reconnaître personnellement.
Le tribunal rejette aussi l'idée selon laquelle ces données ne seraient pas " sensibles " parce qu'elles concernent la vie professionnelle. Même si elles ne relèvent pas de la vie privée, elles restent bel et bien des données personnelles, comme le précise le RGPD.
Enfin, ces informations ont été collectées sans que Mme [C] en soit informée ni qu'elle ait donné son accord. Elles venaient de bases comme Infobel ou Orange, et ont été utilisées à son insu. Cela contrevient au RGPD, car sans information préalable, elle n'a pas pu exercer son droit de s'y opposer.
Une fiche Google My Business peut être supprimée si elle porte atteinte aux droits de la personne concernée
Google tentait de justifier la création automatique d'une fiche Google My Business (GMB) au nom de Mme [C] en invoquant un " intérêt légitime à informer le public ", comme le permet l'article 6 du RGPD. Mais la Cour a procédé à un examen approfondi, étape par étape :
- L'intérêt invoqué est-il légitime ?
- Le traitement des données est-il nécessaire pour atteindre cet objectif ?
- Cet intérêt l'emporte-t-il sur les droits de la personne concernée ?
Ce que la Cour a constaté :
- Oui, il y a un objectif d'information du public, mais ce n'est pas le seul :
- Google a aussi des objectifs commerciaux, comme vendre des services ou forcer la création d'un compte pour gérer la fiche.
- Mme [C] se retrouve obligée de créer un compte Google pour contester des avis, ce qui est jugé excessif.
- En tant que professionnelle de santé, elle est tenue au secret médical, ce qui limite fortement sa capacité à répondre aux critiques publiques, notamment anonymes.
- De plus, les avis ne sont pas vérifiés, certains sont anonymes ou ne viennent même pas de patients : cela déséquilibre la situation.
En application de l'article 17 du RGPD, Mme [C] a le droit de faire supprimer sa fiche GMB. Les arguments de Google basés sur la liberté d'expression ou d'information sont rejetés, car :
- Les avis sont anonymes et non vérifiés,
- Leur suppression impose des contraintes injustifiées à la personne concernée.
La Cour reconnaît également un préjudice moral pour Mme [C], et lui accorde 10 000 euros de dommages-intérêts.
La Cour d'appel de Chambéry envoie un message clair : les données personnelles d'un professionnel ne peuvent pas être utilisées sans discernement au nom d'objectifs commerciaux. Cette décision crée un précédent important pour d'autres professionnels qui souhaiteraient s'opposer à une fiche GMB imposée, notamment lorsqu'elle est générée sans leur consentement.