Chère madame,
Je comprends parfaitement votre démarche et l'urgence de protéger vos enfants face à un passé aussi douloureux et des comportements que vous estimez dangereux. Votre décision de couper les ponts est une mesure de protection légitime, et votre souhait de formaliser cette protection juridiquement est tout à fait compréhensible.
Voici les éclaircissements sur vos questions :
1. Si je saisis le JAF de manière unilatérale, mes parents seront-ils informés de cette procédure ?
Oui, absolument. Lorsque vous saisissez le Juge aux Affaires Familiales (JAF) de manière unilatérale (par une requête), il est obligatoire que l'autre partie soit informée de cette procédure. Le principe du contradictoire est fondamental en justice : toute personne concernée par une demande en justice doit en être informée pour pouvoir préparer sa défense et faire valoir ses arguments.
Même si vos parents n'ont rien demandé à ce jour, votre requête vise à les priver d'un potentiel droit (celui de solliciter un droit de visite et d'hébergement sur leurs petits-enfants). Ils seront donc convoqués devant le JAF et recevront une copie de votre requête et des pièces que vous produisez.
2. Le JAF peut-il refuser ma demande, malgré le contexte grave ?
Oui, le JAF a la possibilité de refuser votre demande, mais votre dossier est solide et les chances de succès sont élevées si les faits sont établis.
Le JAF statue dans l'intérêt de l'enfant. Sa décision se basera sur l'évaluation de ce qui est le mieux pour le bien-être et la sécurité de vos enfants.
Dans votre cas, le contexte est extrêmement grave et vous avez de nombreux arguments forts :
Vos antécédents personnels : Votre expérience de maltraitance psychologique, de manipulations, l'alcoolisme de votre père et, surtout, les abus à caractère sexuel sont des éléments très lourds qui, s'ils sont prouvés ou étayés, justifient pleinement l'interdiction de contact.
La plainte pénale : Le dépôt d'une plainte pénale pour ces abus est une preuve concrète de la gravité des faits dénoncés. Même si la procédure pénale est longue et le résultat incertain à ce stade, son existence est un élément de preuve pour le JAF.
Le comportement actuel de votre mère : Les cartes envoyées aux enfants avec des tentatives de manipulation (ticket de caisse d'un bijou cher) et le non-respect de votre décision de couper les ponts confirment son comportement intrusif et potentiellement nocif. Cela démontre qu'elle ne respecte pas les limites que vous avez posées et qu'elle cherche à établir un lien direct avec les enfants en l'absence de votre consentement, ce qui est une faute.
Le trouble de la personnalité suspecté : Si vous pouvez faire établir (par des attestations, rapports, etc.) que l'un de vos parents souffre d'un trouble mental lourd qui représente un danger pour les enfants, ce sera un argument supplémentaire.
Le JAF examinera attentivement tous ces éléments. Il pourra également ordonner une enquête sociale ou une expertise médico-psychologique si des doutes subsistent sur la situation et les risques encourus par les enfants.
En résumé : Le JAF évaluera si les contacts avec vos parents représentent un danger physique ou psychologique pour vos enfants. Au vu de ce que vous décrivez, votre demande est fondée sur des motifs très sérieux et a de fortes chances d'être accueillie favorablement, car l'intérêt supérieur de l'enfant est de ne pas être exposé à de tels risques.
3. Cette démarche pourrait-elle les inciter à contre-attaquer ou formuler une demande de droit de visite ?
Oui, c'est une possibilité concrète et très probable.
En saisissant le JAF, vous les obligez à prendre position. Face à votre demande d'interdiction de contact, vos parents auront deux options principales :
Accepter la situation : Ils pourraient choisir de ne pas s'opposer, ou de s'opposer mollement, si leur situation (notamment au regard de la plainte pénale ou de leur état psychologique) est trop fragile pour affronter la justice.
Contre-attaquer : Plus fréquemment, surtout s'ils estiment avoir un lien avec leurs petits-enfants, ils pourraient :
Contester votre version des faits : Ils tenteront de minimiser ou de nier les abus et les manipulations.
Formuler à leur tour une demande de droit de visite et d'hébergement : Ils pourraient tenter d'obtenir un droit de contact avec vos enfants, arguant de leur statut de grands-parents et de l'intérêt des enfants à connaître leurs aïeux. C'est un droit reconnu, mais il n'est jamais absolu et est toujours apprécié dans l'intérêt de l'enfant.
Stratégie à adopter :
Votre avocat (que vous devez impérativement consulter si ce n'est déjà fait) jouera un rôle crucial ici. Il devra :
Préparer un dossier très solide : Inclure toutes les preuves et témoignages possibles (certificat médical des urgences, récépissé de la plainte pénale, attestations de tiers sur votre état psychologique ou sur les comportements de vos parents, copies des cartes et du ticket de caisse, etc.).
Anticiper leurs arguments : Il vous aidera à préparer vos réponses et votre défense face à une éventuelle contre-attaque ou demande de droit de visite.
Mettre en avant l'intérêt supérieur de l'enfant : C'est le cœur de votre argument. Il faudra démontrer que tout contact avec ces grands-parents mettrait en péril l'équilibre et la sécurité de vos enfants. Les faits que vous décrivez sont des arguments très forts pour justifier un refus.
Conseils fondamentaux :
Ne faites AUCUNE démarche seule : La complexité de la situation et les enjeux (protection de vos enfants, plainte pénale en cours) exigent l'accompagnement d'un avocat spécialisé en droit de la famille et, si possible, ayant des compétences en droit pénal.
Rassemblez toutes les preuves : Chaque détail compte. Prenez des photos, faites des copies, recueillez des attestations de proches, de professionnels (médecins, psychologues si vous en consultez pour le suivi de votre traumatisme).
Protégez-vous : Une procédure de cette nature est épuisante émotionnellement. N'hésitez pas à vous faire accompagner sur le plan psychologique également.
Votre démarche est courageuse et nécessaire. Le système judiciaire peut et doit vous aider à protéger vos enfants.
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Bonjour Maître,
Je vous remercie infiniment et du fond du cœur pour avoir pris ce temps pour me répondre de manière si délicate!
Je prends bonne note de vos précieux conseils !
il y a 11 jours
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