Bonjour,
Je comprends que vous traversez une période de prise de conscience douloureuse face à votre passé et aux conséquences de ce que vous décrivez comme une négligence parentale. Le fait de réaliser aujourd'hui l'impact d'un handicap psychique non pris en charge pendant votre minorité est très lourd.
Votre question touche à des principes fondamentaux du droit, notamment la responsabilité parentale et le droit à la santé des enfants.
1. L'Obligation Parentale et le Droit à la Santé de l'Enfant Mineur
Oui, absolument. Les parents ont des obligations légales claires envers leurs enfants mineurs, qui sont au cœur de l'autorité parentale.
Article 371-1 du Code civil : "L'autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant. Elle appartient aux parents jusqu'à la majorité ou l'émancipation de l'enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne."
Obligation de protéger la santé : Cette obligation de protection de la santé est primordiale. Elle implique non seulement de fournir les soins nécessaires en cas de maladie physique, mais aussi de veiller au bien-être psychologique de l'enfant et de rechercher une aide professionnelle en cas de troubles avérés (psychiques, cognitifs, comportementaux).
Négligence : Le fait que votre mère, de surcroît infirmière, n'ait rien fait face à un problème de "structuration du mental et de la personnalité" et à des problèmes cognitifs, alors qu'un traumatisme à la naissance était suspecté, peut être considéré comme une négligence grave dans l'exercice de cette obligation.
2. Notions de Perte de Chance et de Responsabilité Parentale
Votre situation relève potentiellement de ces deux notions :
Responsabilité parentale : On peut envisager une responsabilité civile de vos parents (ou de votre mère si elle était seule en charge ou si le père était également défaillant) pour le préjudice que vous avez subi du fait de cette négligence. Le fondement serait l'article 1240 (ancien 1382) du Code civil : "Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer."
La "faute" serait la négligence dans l'obligation de veiller à votre santé et à votre développement.
Le "dommage" serait vos "lésions psychologiques", vos problèmes cognitifs, votre parcours professionnel impacté, et plus largement, les préjudices liés à une vie affectée par un trouble non pris en charge.
Le "lien de causalité" serait le fait que l'absence de prise en charge a directement causé ou aggravé ces dommages.
Perte de chance : C'est un préjudice qui consiste en la disparition certaine d'une éventualité favorable. Dans votre cas, on pourrait argumenter que la négligence parentale vous a fait perdre la chance :
D'être diagnostiqué(e) et traité(e) précocement, ce qui aurait pu améliorer significativement votre pronostic et votre qualité de vie.
D'avoir une scolarité plus fluide et un parcours professionnel plus stable.
De vous développer de manière plus harmonieuse sur le plan psychique et social.
C'est un préjudice à part entière, dont l'indemnisation est calculée en fonction de la probabilité de réussite de cette chance perdue.
3. Recours Judiciaires Possibles
Oui, des recours judiciaires sont possibles, mais ils sont complexes et soulèvent plusieurs défis.
Nature de l'action : Il s'agirait d'une action en responsabilité civile devant le Tribunal Judiciaire, visant à obtenir une indemnisation pour les préjudices subis.
Délai de prescription : C'est le principal obstacle. Le délai de prescription pour une action en responsabilité civile est généralement de cinq ans à compter du jour où la victime a eu ou aurait dû avoir connaissance des faits lui permettant d'exercer son droit.
Dans votre cas, la complexité est de déterminer quand ce délai commence à courir. Si vous avez été "guéri depuis peu" et que vous n'avez pris conscience de l'ampleur de ces négligences et de leurs causes qu'à l'âge adulte et récemment, il y a un argument à faire valoir que le point de départ de la prescription est récent (le jour où vous avez eu connaissance de votre "guérison" et de la cause de vos troubles).
Cependant, il faudra prouver que votre état antérieur vous empêchait de comprendre ou d'agir plus tôt. C'est un débat juridique complexe.
Preuves à apporter :
Preuve du handicap et des troubles : Il faudra des rapports d'experts (psychiatres, psychologues, neurologues, etc.) qui attestent de votre ancien handicap psychique, de ses conséquences, et de son origine probable (traumatisme à la naissance).
Preuve de la négligence parentale : Il faudra démontrer que vos parents (ou votre mère) avaient connaissance de vos difficultés ou auraient dû en avoir connaissance, et qu'ils n'ont pas agi pour rechercher un diagnostic et une prise en charge. Les témoignages de proches, d'anciens professeurs, des éléments de dossiers scolaires ou médicaux de l'époque pourraient être utiles.
Lien de causalité : Démontrer le lien entre cette négligence et les préjudices que vous avez subis (perte de chance scolaire, professionnelle, psychologique).
Mon Conseil
Consultez un avocat spécialisé : C'est absolument indispensable. Vous avez besoin d'un avocat spécialisé en droit de la responsabilité civile et potentiellement en droit de la santé ou droit des personnes. Il sera le seul à pouvoir évaluer la faisabilité de votre action, notamment au regard du délai de prescription, et à vous aider à constituer un dossier solide.
L'avocat pourra également vous orienter vers des experts (médicaux et psychologiques) pour évaluer précisément vos préjudices et le lien avec la négligence.
Rassemblez tous les documents possibles : Dossiers médicaux de votre enfance, dossiers scolaires, témoignages de proches qui pourraient avoir conscience de votre situation ou des manquements de vos parents.
Cette démarche est émotionnellement très lourde, mais elle peut être un chemin vers la reconnaissance du préjudice subi et une forme de réparation.
Merci d’indiquer que j’ai répondu à votre question en cliquant sur le bouton vert de ma réponse.
Merci, vous avez répondu à ma question.
Impressionné par votre réactivité ( à 7 h 45 du matin !!) , la longueur et la qualité de votre réponse : citation de plusieurs articles de droit, description détaillée de la démarche à suivre, obstacles ..
Dans mon cas, ce qu 'on appelle un (gros) "faux self" ..en quelque sorte.
J'ai déjà beaucoup de documents médicaux à ma disposition .
Merci beaucoup
il y a 2 jours
Cliquez ici pour ajouter un commentaire