Savoir déterminer la nature juridique du balcon
1. Balcon : partie commune ou privative ? Le paradoxe du mille-feuille
En matière de copropriété, la frontière entre parties communes et privatives est souvent trompeuse.
Vous pensez "jouissance " (je suis seul sur mon balcon), le droit pense "structure " (ce qui tient l'immeuble).
Visualisez votre balcon comme un sandwich :
- Le pain du dessous (La structure en béton) : C'est le squelette de l'immeuble
- La garniture (L'étanchéité) : La couche invisible qui empêche l'eau de passer.
- Le pain du dessus (Le carrelage) : Ce que vous voyez et sur quoi vous marchez.
La loi du 10 juillet 1965 est formelle : tout ce qui touche au gros oeuvre est une partie commune.
La jurisprudence, elle, est pragmatique : l'étanchéité fait corps avec le gros oeuvre. Sans elle, le béton s'abime.
Résultat : Le béton et l'étanchéité appartiennent à la copropriété (partie commune). Le carrelage vous appartient (partie privative).
Autrement dit, puisque l'étanchéité protège la structure de l'immeuble, sa réparation incombe au syndicat des copropriétaires. C'est une charge commune générale.
- " Mais Maître, pour réparer l'étanchéité, ils vont devoir casser mon carrelage italien importé ! ", me direz-vous.
C'est là que ça devient intéressant. Si l'accès à la partie commune (étanchéité) nécessite la destruction de la partie privative (carrelage), la copropriété doit remettre en état. C'est la théorie de
l'accessoire.
Le piège : La remise en état se fait au standard de l'immeuble. Si vous avez posé du marbre de Carrare sur un balcon prévu pour du grès cérame basique, la différence de prix est pour vous.
2. L'exception qui fait mal : quand la responsabilité du copropriétaire est engagée
Ne criez pas victoire trop vite.
La copropriété paie,
sauf si vous avez joué aux apprentis bricoleurs.
L'assurance de l'immeuble se retournera contre vous si :
- Vous avez percé la membrane d'étanchéité pour fixer vos jardinières (grand classique).
- Vous avez posé un caillebotis qui bloque l'évacuation des eaux.
- Vous n'avez jamais nettoyé les regards d'évacuation
Restez vigilants lors de travaux sur cet espace sensible.
Le règlement de copropriété, arbitre suprême (que personne ne lit)
Avant de déclarer la guerre à votre syndic ou de signer un devis, il reste une étape. Celle que tout le monde oublie et qui coûte cher.
Il faut lire le Règlement de Copropriété.
C'est la " Loi des Parties ". Certains règlements anciens ou mal rédigés classent tout le balcon, étanchéité comprise, en partie privative.
Si le règlement de copropriété prévoit expressément que tout le balcon, étanchéité comprise, est partie privative, ce texte s'applique, sous réserve des clauses contraires à la loi ou susceptibles d'être réputées non écrites.
Comme le rappelle notre méthodologie : interroger la loi, puis le règlement de copropriété, et en ultime recours saisir le juge par le biais d'un avocat (obligatoire) en cas de désaccord.
Sans cette lecture, vous naviguez à l'aveugle.
En résumé : la méthode en 4 temps
Elle est simple, il ne faut pas paniquer.
1. La déclaration : Prenez des photographies et avertissez le syndic. Il se charge de l'assurance de l'immeuble, et vous du vôtre ;
2. L'origine : Est-ce l'usure du temps (Copro) ou un trou de perceuse (Vous) ?
3. Le texte : Que dit le règlement de copropriété ?
4. Le vote : Pas de travaux sur l'étanchéité sans vote en AG, sauf urgence absolue (péril).
Sauf faute du copropriétaire ou clause particulière du règlement, l'étanchéité du balcon est une charge de copropriété, décidée et votée en assemblée générale.