Chère Madame Jaabouka Aicha,
Je lis votre témoignage avec une grande attention et je mesure l'ampleur de votre souffrance, tant physique que psychologique. Ce que vous décrivez est une situation très difficile et anormale, qui soulève de sérieuses questions sur la prise en charge médicale dont vous avez bénéficié.
Face à un tel vécu, il est absolument légitime de chercher à comprendre ce qu'il s'est passé, à vous faire entendre et à obtenir réparation. Voici les étapes que vous pouvez envisager. Il est crucial de vous faire accompagner.
1. Rassembler toutes les preuves médicales
C'est la première étape indispensable et la plus importante. Vous avez le droit d'accéder à l'intégralité de votre dossier médical.
Demandez votre dossier médical complet :
Faites une demande écrite (lettre recommandée avec accusé de réception) à la direction de l'hôpital de Perpignan.
Demandez TOUS les documents concernant vos hospitalisations de février 2025 et les suivantes : comptes rendus d'IRM (avant et après chaque opération), comptes rendus opératoires (détaillant ce qui a été fait), comptes rendus d'hospitalisation, notes médicales, prescriptions (notamment de morphine), comptes rendus d'anesthésie (avec l'avis de l'anesthésiste sur votre état cardiaque), feuilles de surveillance, courriers des médecins (y compris votre médecin traitant et la kiné), etc.
Précisez bien que vous souhaitez les dossiers pour les deux hospitalisations/opérations.
L'hôpital a 8 jours pour vous répondre si les informations sont disponibles immédiatement, et 2 mois si les dossiers datent de moins de 5 ans ou si les recherches sont plus complexes. Ils ne peuvent pas refuser.
2. Faire évaluer votre situation par un médecin-conseil indépendant
Une fois votre dossier médical en main, il est fondamental d'avoir un avis extérieur et objectif sur la qualité des soins que vous avez reçus.
Consultez un médecin-conseil (expert médical indépendant) : Il ne s'agit pas de votre médecin traitant, mais d'un médecin spécialisé dans l'évaluation des responsabilités médicales. Il analysera votre dossier et pourra vous dire si, selon lui, il y a eu une faute médicale, une négligence, un défaut d'information, ou si vos séquelles sont une complication "normale" mais avec un droit à indemnisation (même sans faute).
Comment trouver un médecin-conseil ? Votre avocat (voir point 3) pourra vous en recommander un. Vous pouvez aussi contacter des associations de victimes d'erreurs médicales.
3. Les démarches possibles pour vous faire entendre et obtenir réparation
Une fois que vous aurez l'avis du médecin-conseil, plusieurs voies peuvent être explorées :
A. La voie amiable (prioritaire) : Saisine de la Commission de Conciliation et d'Indemnisation (CCI)
C'est la voie la plus souvent recommandée en premier lieu. C'est une instance gratuite et indépendante qui vise à faciliter l'indemnisation des victimes d'accidents médicaux (faute ou aléa thérapeutique).
Rôle de la CCI : Elle organise une expertise médicale collégiale (avec des médecins différents de l'hôpital) pour déterminer si une faute a été commise, ou si les séquelles sont dues à un "aléa thérapeutique" (complication rare et imprévisible non due à une faute). Elle rend un avis.
Conditions : Vos séquelles doivent être d'une certaine gravité (seuil de gravité, par exemple, un taux d'incapacité permanente partielle supérieur à 25% ou un arrêt de travail d'au moins 6 mois consécutifs ou 6 mois non consécutifs sur 12 mois). Au vu de ce que vous décrivez (déambulateur, chaise roulante, incontinence, dépendance), vous semblez largement remplir ces critères.
Avantage : Si l'avis est favorable à une faute ou à un aléa indemnisable, un assureur (de l'hôpital ou de l'ONIAM) vous fera une offre d'indemnisation. C'est rapide par rapport à la justice et sans frais d'avocat obligatoires (même si conseillés).
Comment saisir la CCI ? Rendez-vous sur le site de l'ONIAM (Office National d'Indemnisation des Accidents Médicaux) qui gère les CCI : https://www.oniam.fr/. Vous y trouverez les formulaires et la procédure.
B. La voie judiciaire (en parallèle ou après la CCI) :
Si la CCI n'aboutit pas, ou si vous préférez cette voie, vous pouvez saisir le tribunal compétent.
Devant le tribunal administratif : Si l'hôpital est public, il faut saisir le tribunal administratif pour faute du service public hospitalier.
Devant le tribunal judiciaire : Si l'hôpital est privé (clinique), il faut saisir le tribunal judiciaire pour responsabilité civile.
Avantage : Le juge tranchera la question de la responsabilité et fixera l'indemnisation.
Inconvénient : C'est une procédure longue, complexe et coûteuse (honoraires d'avocat, frais d'expertise judiciaire).
L'avocat est obligatoire pour cette voie.
4. L'importance de l'accompagnement juridique et associatif
Prenez un avocat spécialisé en droit de la santé et/ou réparation du préjudice corporel : C'est la personne clé pour vous guider. Il vous aidera à constituer votre dossier, à rédiger les demandes, à choisir la meilleure stratégie (CCI ou tribunal), et à défendre vos droits. Les honoraires peuvent être en partie liés au résultat.
Contactez des associations de victimes d'accidents médicaux : Elles peuvent vous offrir un soutien moral, des informations précieuses, et vous orienter vers des professionnels compétents (avocats, médecins-conseils). Par exemple, l'AAAVAM (Association d'Aide aux Victimes d'Accidents Médicaux), ou d'autres associations locales.
Points particuliers de votre récit :
Le comportement du médecin : "Ton dur", "pas possible", "refuse l'avis de l'anesthésiste", "déni d'empathie", "séquelles à vie et dans 1 an". Ces éléments sont graves et peuvent témoigner d'un manquement au devoir d'information, voire d'un comportement contraire à la déontologie. Notez tout ce que vous avez vécu et les propos tenus.
Le suivi post-opératoire : Le fait d'avoir été "laissée sans suivi" alors que votre état s'aggravait, au point que votre kiné s'alarme, est un point crucial. Un défaut de suivi ou un retard de prise en charge peut constituer une faute.
Les récidives et complications : Les déplacements des problèmes après les opérations sont des éléments médicaux qui devront être analysés par des experts.
Madame Jaabouka Aicha, ne restez pas seule face à cette épreuve. Ce que vous vivez est une véritable injustice. Des voies de recours existent. Commencez par récupérer votre dossier médical, puis contactez un avocat et/ou la CCI. Vous avez le droit d'être entendue et d'obtenir réparation pour les préjudices que vous subissez.
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