Bonjour,
Je comprends parfaitement votre sentiment de frustration et d'injustice face à cette situation. Votre parcours de demande d'aide financière auprès de la CPAM est semé d'embûches, et il est légitime de vouloir faire valoir vos droits.
Vous avez déjà épuisé la voie amiable (assistante sociale CPAM, puis médiatrice de la CPAM), ce qui est une étape nécessaire avant de saisir la justice. La réponse de la médiatrice indiquant qu'aucune nouvelle demande sur le même motif ne recevrait de réponse confirme que la voie amiable est close pour ce recours.
Vous pouvez en effet saisir le tribunal pour contester la décision de la Commission d'action sanitaire et sociale de la CPAM.
1. Le tribunal compétent et les motifs juridiques possibles pour contester les pratiques de la CPAM
Le tribunal compétent pour contester une décision de la CPAM concernant l'action sanitaire et sociale est le Tribunal Judiciaire, pôle social (anciennement Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale - TASS).
Voici les motifs juridiques précis que vous pouvez invoquer pour contester la décision de la CPAM :
a. Violation du principe d'individualisation de l'aide et de prise en compte de la situation du demandeur
Fondement : Le principe même de l'action sanitaire et sociale de l'Assurance Maladie est d'accorder des aides ponctuelles et individualisées pour faire face à des situations exceptionnelles ou de précarité. L'article L262-1 du Code de la Sécurité Sociale (qui régit l'action sanitaire et sociale) indique que les caisses doivent "mettre en œuvre une politique d'action sanitaire et sociale [...] afin de favoriser l'accès aux soins et la prévention, ainsi que l'insertion sociale et professionnelle." La prise en compte de la situation personnelle et financière est implicite et essentielle à cette mission.
Votre argument : Vous êtes bénéficiaire de la Complémentaire Santé Solidaire (CSS), ce qui atteste d'une situation de précarité avérée et reconnue. Votre revenu fiscal de référence (RFR) de 1457 € et l'absence de revenus ou d'épargne confirment cette précarité. Le fait que la commission n'ait pas pris en compte vos ressources et vos autres impayés pour justifier le refus est une violation manifeste de l'obligation d'apprécier votre situation dans sa globalité.
Preuve : Le courriel de l'assistante sociale CPAM demandant vos justificatifs de revenus renforce votre argument que ces éléments devaient être pris en compte.
b. Erreur manifeste d'appréciation / Erreur de fait
Fondement : L'administration ne doit pas prendre de décisions basées sur des faits inexacts ou une mauvaise interprétation de la situation.
Votre argument : Le motif invoqué par la commission, "vous n'avez pas fait valoir vos droits à la retraite", constitue une erreur manifeste d'appréciation et de fait. Vous êtes en mesure de prouver (par votre situation concernant les trimestres, l'action en justice en cours) que demander une retraite incomplète est impossible ou préjudiciable dans votre situation actuelle. Ce motif n'est pas pertinent ni justifié.
Preuve : Les éléments concernant vos trimestres, l'action en justice, et le fait que cela irait à l'encontre de votre recherche d'emploi stable.
c. Manquement à l'obligation de motivation
Fondement : Toutes les décisions administratives défavorables (comme un refus d'aide) doivent être motivées de manière claire et précise (Code des relations entre le public et l'administration - CRPA, articles L211-2 et suivants). La motivation doit permettre de comprendre pourquoi la décision a été prise.
Votre argument : Si le refus ne détaille pas comment vos ressources ont été évaluées ou pourquoi elles n'ont pas été jugées suffisantes (alors même que vous êtes CSS), ou si le motif de la retraite est le seul avancé, la motivation peut être jugée insuffisante au regard de votre situation complexe.
d. Discrimination (potentiellement)
Fondement : Bien que plus difficile à prouver, le sentiment de "maltraitance" et de "discrimination" peut être exploré si vous estimez que le traitement que vous avez reçu est différent et injustifié par rapport à d'autres situations comparables, ou s'il y a eu un traitement inéquitable sans base légale.
Votre argument : Le refus de la médiatrice de considérer de nouvelles demandes et le sentiment que votre situation n'est pas prise en compte alors que vous remplissez les critères objectifs de précarité pourraient être des éléments. Cependant, c'est un motif plus difficile à défendre seul.
2. Les procédures à suivre pour déposer une telle saisie
La procédure est généralement la suivante :
Dépôt d'une requête introductive d'instance :
Vous devrez adresser un courrier (requête) au greffe du pôle social du Tribunal Judiciaire de votre domicile.
Ce courrier doit exposer clairement les faits, vos arguments juridiques (en citant les points ci-dessus), et ce que vous demandez au tribunal (l'annulation de la décision de refus de la CPAM et l'octroi de l'aide financière, ou le renvoi du dossier à la commission pour une nouvelle évaluation).
Vous pouvez vous inspirer des motifs juridiques listés ci-dessus pour rédiger votre argumentation.
La procédure est en principe gratuite (pas besoin d'avocat obligatoire au pôle social, bien que très fortement recommandé au vu de la complexité de votre dossier).
Mise en état et échange de conclusions :
Le tribunal convoquera les parties (vous et la CPAM).
Il y aura un échange de "conclusions" (des écrits argumentés) entre vous et la CPAM. La CPAM expliquera ses motifs de refus, et vous pourrez y répondre.
Audience :
Une audience aura lieu où les parties pourront présenter leurs arguments oralement devant le juge.
Jugement :
Le juge rendra sa décision.
3. Les délais à respecter et les documents nécessaires
a. Délais à respecter :
Délai de recours : Après le refus de la Commission CPAM et l'échec de la médiation, vous disposez généralement d'un délai de 2 mois pour saisir le Tribunal Judiciaire (pôle social). Ce délai commence à courir à partir de la date de la notification de la décision de la médiatrice clôturant votre dossier. Vérifiez bien la date sur la lettre de la médiatrice. Si ce délai est dépassé, votre action sera irrecevable.
Absence de réponse de la commission ou du médiateur : Si vous n'avez pas eu de réponse de la commission après votre demande initiale dans un délai de deux mois, cela équivaut à une décision implicite de rejet, et le délai de 2 mois pour saisir le tribunal commence à partir de la fin de ce délai de deux mois.
b. Documents nécessaires pour appuyer votre demande :
Il est crucial de constituer un dossier solide. Voici les documents indispensables :
Copie de la décision de refus de la Commission CPAM.
Copie des courriers échangés avec la médiatrice de la CPAM (demande de médiation, réponse de la médiatrice clôturant le dossier).
Courriel de l'assistante sociale CPAM demandant vos justificatifs de revenus (preuve qu'ils avaient demandé ces infos).
Vos justificatifs de revenus : Dernier avis d'imposition (avec votre RFR de 1457 €), et tout document prouvant l'absence de revenus ou d'épargne actuelle.
Preuve de votre bénéfice de la Complémentaire Santé Solidaire (CSS).
Justificatifs de vos dépenses de soins non remboursées (992,77 €), avec attestation médicale de leur nécessité.
Justificatifs des autres impayés (1248,43 €) pour prouver votre situation financière globalement difficile.
Documents relatifs à votre situation concernant la retraite : (si possible) justificatifs du nombre de trimestres, preuve de l'action en justice contre votre ancien employeur.
Toute preuve de vos démarches de recherche d'emploi pour contredire l'idée que vous devriez demander une retraite incomplète.
Votre pièce d'identité.
Conseil important :
Compte tenu de la complexité de ce type de procédure et des arguments à soulever, il est fortement recommandé de vous faire accompagner par un avocat spécialisé en droit de la sécurité sociale. Même si la représentation par avocat n'est pas obligatoire devant le pôle social du Tribunal Judiciaire, ses connaissances juridiques et procédurales seront un atout majeur pour défendre au mieux votre dossier. De plus, au vu de vos revenus, vous avez probablement droit à l'aide juridictionnelle pour couvrir les frais d'avocat.
Ne vous laissez pas décourager par le refus de la médiatrice. Votre démarche est légitime et vous avez des arguments solides.
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il y a 2 jours
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