Bonjour,
Je comprends votre incompréhension et votre sentiment d'injustice, surtout après une si longue occupation de la maison par votre mère et des délais administratifs indépendants de votre volonté.
Votre notaire vous a probablement informé d'une plus-value car la vente intervient plus de deux ans après l'entrée de votre mère en EHPAD. Expliquons les règles et les arguments que vous pouvez faire valoir.
1. Le principe de l'exonération de la résidence principale et la règle des deux ans pour l'EHPAD
Exonération de la résidence principale : La plus-value réalisée lors de la vente de la résidence principale du vendeur est totalement exonérée d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux. C'est l'exonération la plus avantageuse.
Cas des personnes âgées en EHPAD : Cette exonération est étendue aux personnes âgées (ou handicapées) qui quittent leur résidence principale pour être hébergées dans un établissement médico-social (comme un EHPAD), à condition que la vente intervienne dans un délai de deux ans suivant leur départ du domicile et qu'elles ne soient pas assujetties à l'Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) et que leur revenu fiscal de référence de l'année N-2 ne dépasse pas un certain seuil.
Votre mère est entrée en EHPAD fin janvier 2023. Le délai de deux ans s'est donc écoulé fin janvier 2025. La vente aujourd'hui (juillet 2025) dépasse ce délai, d'où l'avis de votre notaire.
2. L'impact du délai dû à l'habilitation familiale : l'argument de la "force majeure" ou "cause indépendante de la volonté"
C'est votre argument principal et le plus fort pour contester l'application de l'impôt sur la plus-value de la résidence principale de votre mère.
L'administration fiscale et la jurisprudence admettent que le délai de deux ans puisse être dépassé lorsque le retard est dû à des circonstances indépendantes de la volonté du cédant (le vendeur).
L'obtention d'une habilitation familiale pour votre mère, en raison de ses problèmes cognitifs, est une procédure judiciaire obligatoire et indispensable pour pouvoir vendre le bien. Le fait que cette procédure ait pris de février 2024 à décembre 2024 (près d'un an) est clairement une cause indépendante de votre volonté et de celle de votre mère. Sans cette habilitation, la vente était tout simplement impossible.
Stratégie : Vous devrez présenter ces éléments à l'administration fiscale (via votre notaire, qui est le collecteur de l'impôt sur la plus-value) pour demander l'application de l'exonération de la résidence principale malgré le dépassement du délai de deux ans. Le notaire peut joindre une note explicative à la déclaration de plus-value, ou vous pouvez demander un "rescrit fiscal" à l'administration pour obtenir une réponse officielle en amont.
3. Les abattements pour durée de détention
Même si l'exonération de la résidence principale ne s'appliquait pas (ce qui serait contestable au vu de la procédure d'habilitation), il existe des abattements pour la durée de détention du bien.
Pour l'impôt sur le revenu : Abattement de 6% par an au-delà de la 6ème année et jusqu'à la 21ème année de détention, puis 4% pour la 22ème année, aboutissant à une exonération totale après 22 ans de détention.
Pour les prélèvements sociaux : Abattement de 1,65% par an de la 6ème à la 21ème année, 1,60% pour la 22ème année, puis 9% de la 23ème à la 30ème année, aboutissant à une exonération totale après 30 ans de détention.
Application à votre situation (démembrement de propriété) :
La situation est un peu complexe car le bien était en démembrement de propriété :
La part de votre mère (1/4 en pleine propriété) : Si elle a acquis cette part avec votre père en 1950, la durée de détention est de 73 ans. Cette part sera donc totalement exonérée de plus-value immobilière, tant pour l'impôt sur le revenu que pour les prélèvements sociaux, en raison de la très longue durée de détention.
La part des enfants (3/4 en nue-propriété issue de la succession de votre père) : Pour les 3/4 de la nue-propriété, la date d'acquisition est le décès de votre père, soit août 2013. La vente en juillet 2025 signifie une détention d'environ 12 ans.
Cette part ne sera pas totalement exonérée par la durée de détention (il manque encore des années pour atteindre les 22 ou 30 ans).
C'est sur cette part que la plus-value pourrait potentiellement être taxable si l'exonération de la résidence principale pour la mère ne s'applique pas. La plus-value serait calculée sur la différence entre la valeur de la nue-propriété en août 2013 (date de la succession) et la valeur de la nue-propriété à la vente en juillet 2025.
4. L'exonération pour les personnes âgées modestes (si la vente n'est pas la résidence principale)
Il existe une autre exonération pour la vente d'un logement (qui n'est pas forcément la résidence principale) par une personne âgée (plus de 65 ans) ou invalide, dont les revenus sont modestes. Les conditions sont :
Le vendeur ne doit pas être soumis à l'IFI.
Le revenu fiscal de référence (RFR) de l'année N-2 (donc 2023 pour une vente en 2025) ne doit pas dépasser un certain seuil (pour 2023, c'est environ 27 900 € pour une personne seule).
Si votre mère respecte ces conditions, cette exonération pourrait s'appliquer, mais elle est subsidiaire à l'exonération de résidence principale.
Que faire concrètement ?
Demandez à votre notaire un calcul détaillé : Exigez qu'il vous explique précisément la plus-value calculée, en distinguant la part de votre mère et la part des enfants, et les raisons exactes de la taxation.
Mettez en avant la procédure d'habilitation familiale : Insistez auprès de votre notaire sur l'argument de la "cause indépendante de la volonté" liée au délai de l'habilitation familiale. Joignez-lui toutes les preuves (dates de la demande, de la décision du tribunal, durée de la procédure). Le notaire est le premier interlocuteur et peut aider à justifier cela auprès du service des impôts.
Vérifiez le RFR de votre mère : Si l'argument de l'habilitation familiale ne passait pas, vérifiez si votre mère serait éligible à l'exonération pour personnes âgées à faibles revenus.
Conclusion :
Votre argument sur le délai dû à l'habilitation familiale est très solide et devrait normalement permettre de faire jouer l'exonération de la résidence principale pour la part de votre mère (usufruit et pleine propriété). Pour la part des enfants (nue-propriété), la plus-value serait calculée à partir de 2013, mais bénéficiera d'abattements pour durée de détention.
Il est probable que votre notaire ait appliqué la règle des 2 ans de manière stricte sans avoir encore étudié en profondeur la possibilité de l'extension due à l'habilitation familiale. N'hésitez pas à insister sur ce point avec lui.
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