Bonjour,
Votre situation est très frustrante et malheureusement, elle met en lumière un point d'achoppement fréquent entre les droits individuels et les règles d'urbanisme. Vous avez parfaitement cerné le problème en identifiant les acteurs et la procédure de l'article L. 151-13.
Voici une explication détaillée et des pistes d'action possibles.
1. Qui peut demander le traitement exceptionnel de l'article L. 151-13 ?
Votre constat est correct : un particulier ne peut pas, de sa propre initiative, saisir la CDPENAF (Commission Départementale de la Préservation des Espaces Naturels, Agricoles et Forestiers) ou demander l'application de l'article L. 151-13.
Cette procédure d'exception doit être initiée par une autorité publique, à savoir :
La commune (le conseil municipal).
L'établissement public de coopération intercommunale (EPCI), s'il est compétent en matière de plan local d'urbanisme (PLU).
L'idée de cet article est de permettre à l'autorité qui a la responsabilité de la planification (la commune) d'invoquer une exception pour un projet d'intérêt général ou en raison d'une situation particulière (comme le "dents creuses" en zone d'habitat diffus).
2. Pourquoi la justice administrative ne prend-elle pas en compte vos arguments ?
La justice administrative se base sur le principe de la légalité. Le juge administratif ne statue pas sur l'équité ou le bon sens d'une décision, mais sur sa conformité avec les règles de droit.
Votre commune a refusé votre permis de construire sur la base du Plan Local d'Urbanisme (PLU) qui classe votre terrain comme non constructible (par exemple, en zone agricole ou naturelle).
Les constats d'huissier et le fait que les terrains voisins soient construits sont des éléments de fait, mais ils ne changent pas la règle de droit inscrite dans le PLU.
Le juge se limite à vérifier que la décision du maire est conforme au PLU. Si votre terrain est classé inconstructible, le refus du maire est parfaitement légal, et le juge ne peut pas le censurer. C'est ce qui explique le "mur" que vous rencontrez devant le Tribunal Administratif.
3. Quelles sont les solutions possibles ?
Puisque la voie directe est bloquée et que la mairie refuse, il faut envisager d'autres stratégies, qui sont malheureusement complexes et de longue haleine.
La voie politique/administrative :
Plaider votre cause directement auprès du Préfet. Le Préfet est le représentant de l'État dans le département et peut avoir un droit de regard sur les politiques locales. Vous pourriez lui exposer la situation et lui demander d'intervenir auprès de la commune pour qu'elle révise son PLU ou qu'elle sollicite la CDPENAF. C'est une démarche difficile, car le Préfet est réticent à s'immiscer dans la politique d'urbanisme locale.
Convaincre le Conseil municipal. Vous pourriez essayer de faire pression sur le maire et le conseil municipal pour qu'ils engagent une procédure de modification du PLU afin de rendre votre parcelle constructible. C'est une démarche longue, complexe et qui nécessite un vote favorable du conseil.
La voie juridique alternative :
Engager une action en responsabilité de la commune. Dans certains cas, il est possible d'engager la responsabilité de la commune pour faute lourde ou en raison de l'inégalité de traitement. Ce type de procédure est extrêmement difficile et nécessite de prouver que la mairie a commis une faute grave et non un simple refus légal. Les constats d'huissier pourraient être utiles dans ce cadre. Il est impératif de faire appel à un avocat spécialisé en droit de l'urbanisme pour cette procédure.
4. Le recours à la CEDH
Je me permets une mise en garde sur ce point. Le fait que vous ayez saisi la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH) montre votre détermination, mais ce recours a peu de chances d'aboutir. La CEDH ne tranche pas les litiges de droit interne et ne s'immisce pas dans les affaires d'urbanisme. Elle se concentre sur les violations des droits fondamentaux (comme le droit à la vie, la liberté d'expression, etc.). L'urbanisme relève de la souveraineté des États.
En conclusion, la solution réside dans la capacité à faire changer d'avis l'autorité compétente (la mairie ou l'EPCI) pour qu'elle engage la procédure que vous avez identifiée. C'est un combat de longue haleine qui se joue plus sur le plan politique et de la persuasion que sur le plan strictement juridique.
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