Cher monsieur,
Votre situation est très difficile et nécessite une approche à la fois humaine et juridique. Le fait que votre mère soit sans papiers depuis six ans, son âge (75 ans), sa grave dépression non diagnostiquée initialement en Algérie, son arthrose l'empêchant de se déplacer, et l'éloignement de ses enfants sont des éléments clés. Le fait que ses quatre enfants soient français et résident en France est un atout majeur. Le refus de votre père de divorcer complique la situation pour une régularisation via le mariage.
Plusieurs pistes de régularisation sont possibles, souvent cumulables dans l'argumentation :
1. Régularisation pour raisons médicales (Titre de séjour "étranger malade")
C'est une voie très pertinente au vu de la situation de votre mère.
Conditions principales (Art. L. 425-9 du CESEDA) :
Résider habituellement en France : Votre mère est là depuis 6 ans.
Souffrir d'une pathologie grave : La dépression sévère, surtout si elle est associée à d'autres pathologies comme l'arthrose sévère qui l'empêche de se déplacer, peut être considérée comme une pathologie grave. Le fait qu'elle ait des troubles de la mémoire (oubli) pourrait aussi être un symptôme lié à sa dépression ou à d'autres causes, et doit être documenté.
Nécessiter une prise en charge médicale dont le défaut entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité : Cela signifie que si elle n'est pas soignée en France, son état de santé se dégraderait gravement. Le fait qu'elle ne puisse pas se nourrir seule en est une illustration concrète.
Ne pas pouvoir bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine (Algérie) : C'est un point crucial. Vous devrez prouver que les soins nécessaires à son état de santé (prise en charge de la dépression, suivi psychiatrique, accès aux médicaments, aide à domicile pour l'arthrose et la vie quotidienne) ne sont pas accessibles, ou d'une qualité insuffisante, ou de manière appropriée et pérenne en Algérie, compte tenu de la gravité de sa maladie et de sa dépendance. Le fait que le diagnostic n'ait pas pu être posé là-bas est un argument.
Démarches :
Constituer un dossier médical solide : Impliquez son médecin traitant en France, et si possible un spécialiste (gériatre, psychiatre). Ils devront attester de la gravité de son état, de l'indispensabilité des soins en France et de l'impossibilité de les obtenir de manière adaptée en Algérie.
Procédure OFII : La demande est déposée à la préfecture, qui remet un certificat médical à faire remplir par le médecin. Ce certificat est ensuite envoyé à l'Office Français de l'Immigration et de l'Intégration (OFII) pour avis d'un collège de médecins. C'est sur la base de cet avis que le Préfet prend sa décision.
2. Régularisation au titre des liens personnels et familiaux ("Vie privée et familiale" - ascendant de Français)
C'est une voie qui peut être envisagée mais elle est plus difficile pour les parents que pour les enfants de Français.
Conditions (Art. L. 423-23 du CESEDA) :
Être ascendant (parent) d'un enfant français : Vous et vos frères et sœurs êtes ses enfants français.
Preuve de la dépendance : La condition est souvent que l'ascendant soit à la charge de l'enfant français. Votre mère étant âgée, ayant des problèmes de santé et ne pouvant plus vivre seule, elle est clairement à votre charge matérielle et affective. Vous devrez prouver que vous subvenez à ses besoins (logement, nourriture, soins, argent de poche, etc.).
Durée du séjour en France : Six ans est une durée de séjour significative, démontrant un enracinement en France.
Intensité des liens en France : La présence de ses 4 enfants et de ses petits-enfants en France, et l'absence de famille proche capable de s'occuper d'elle en Algérie (puisque votre père ne divorce pas et qu'elle ne peut vivre seule) est un argument très fort pour la préfecture.
Difficultés potentielles :
Ce titre est plus facile à obtenir pour un parent d'enfant français mineur qui contribue à son éducation. Pour un ascendant (parent de majeur), la jurisprudence exige souvent une dépendance matérielle et affective exceptionnelle, et l'absence de liens familiaux proches dans le pays d'origine capables de s'occuper d'elle. Votre description semble correspondre à cette dépendance exceptionnelle.
Le fait qu'elle soit non divorcée peut être un point d'attention si l'administration venait à s'interroger sur l'existence d'un foyer viable en Algérie. Cependant, le fait que votre père ne veuille pas divorcer et qu'elle ne puisse pas vivre seule, même avec lui, est un argument.
3. Régularisation au titre de l'admission exceptionnelle au séjour (AES)
C'est une voie discrétionnaire du Préfet, qui prend en compte un ensemble de critères.
Durée de présence en France : 6 ans est une durée importante.
Liens avec la France : La présence de tous ses enfants français et petits-enfants, le suivi médical, son état de santé fragile, son isolement si elle retournait en Algérie sont autant de preuves de ses attaches profondes en France.
Circonstances humanitaires : Sa situation de santé grave, sa dépendance, et l'impossibilité de retourner vivre seule dans son pays, constituent de fortes raisons humanitaires.
Que faire concrètement ?
Rassemblez toutes les preuves :
Médicales : Tous les dossiers médicaux de France (diagnostics, traitements, suivis, prescriptions). Des attestations des médecins décrivant l'aggravation de son état en Algérie, l'impossibilité d'y recevoir des soins adaptés, et la nécessité de sa présence en France.
Familiales : Vos actes de naissance, les siens, les actes de naissance de vos enfants (ses petits-enfants) prouvant les liens de filiation. Justificatifs de vos domiciles en France.
Charge et dépendance : Preuves de votre contribution à ses besoins (preuves de virement, factures de courses, hébergement, prise en charge de ses frais de santé). Attestations sur l'honneur de vous-mêmes et de vos frères et sœurs sur sa dépendance et son incapacité à vivre seule.
Séjour en France : Tout document attestant de sa présence continue en France depuis 6 ans (factures, quittances de loyer si elle était locataire, témoignages de voisins, etc.).
Consultez une association spécialisée ou un avocat :
Les associations d'aide aux étrangers (Cimade, GISTI, Ligues des Droits de l'Homme, ou associations locales) peuvent vous aider gratuitement à monter le dossier et vous conseiller sur la meilleure stratégie.
Un avocat spécialisé en droit des étrangers est fortement recommandé, surtout au vu de la complexité de la situation (maladie, âge, absence de papiers, situation familiale). Il pourra vous aider à maximiser vos chances, à rédiger les courriers et à défendre au mieux le dossier de votre mère.
Dépôt du dossier : La demande se fera à la préfecture de son lieu de résidence (ou là où elle est hébergée).
Points importants :
Le non-divorce : C'est une difficulté, mais pas forcément rédhibitoire. L'essentiel est de prouver qu'elle ne peut pas retourner vivre en Algérie, même avec votre père, en raison de sa maladie, de sa dépendance, et de l'absence de prise en charge adaptée là-bas.
Vulnérabilité : L'âge de votre mère (75 ans), sa maladie grave, sa dépendance et l'éloignement de tous ses enfants sont des facteurs de vulnérabilité très importants qui seront pris en compte par la préfecture et le juge en cas de recours.
Votre mère a des arguments solides pour une régularisation, notamment via le motif médical et ses liens familiaux très forts en France. Ne tardez pas à agir et à vous faire accompagner.
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il y a 9 jours
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