Bonjour,
Votre message est très complet et met en lumière une situation malheureusement fréquente dans les grands groupes : une mise à disposition informelle et durable d’un salarié d’une société vers une autre, sans respect du cadre légal, et avec des engagements managériaux jamais formalisés. Voici les réponses à vos interrogations, point par point, en tenant compte du droit du travail actuel et de la jurisprudence.
Refus d’exécuter les tâches pour l’entreprise B :
Si vous refusez d’accomplir des missions pour l’entreprise B, votre employeur ne peut pas légitimement vous sanctionner, dès lors que ces tâches n’entrent pas dans le cadre de votre contrat de travail avec l’entreprise A. Vous avez signé un contrat avec l’entreprise A, pas avec B, et rien ne vous oblige légalement à travailler pour une autre société du groupe, sauf avenant ou convention de mise à disposition régulière. En l’absence de ces documents, un refus d’effectuer des tâches pour B ne constitue pas une faute professionnelle, mais cela doit être exprimé de façon claire, argumentée, et sans conflit, pour éviter des tensions internes.
Mise à disposition irrégulière et action prud’homale :
Oui, votre situation relève d’une mise à disposition illégale, au sens des articles L8241-1 à L8241-3 du Code du travail, même si les deux sociétés appartiennent au même groupe. En effet, la jurisprudence rappelle que même au sein d’un groupe, la mise à disposition durable d’un salarié d’une société vers une autre doit respecter des règles précises : accord tripartite, information du salarié, maintien du lien de subordination, et durée limitée. Ce n’est pas votre cas. Une action devant le conseil de prud’hommes est donc envisageable, notamment pour contester cette mise à disposition non encadrée et réclamer réparation du préjudice subi.
Préjudice financier et indemnisation potentielle :
Oui, vous pouvez réclamer des indemnités pour le manque à gagner (primes d’ancienneté, congés supplémentaires, avantages collectifs) que vous auriez perçus si vous aviez été employé dans l’entreprise B, à condition de prouver que vous avez effectivement exercé vos fonctions pour B de manière constante et exclusive. Les preuves indirectes comme les plannings, mails internes, témoignages, fiches de présence, ou toute preuve de votre rattachement à B sont utiles. Vous pouvez aussi chiffrer précisément le préjudice financier (manque à gagner sur les primes et jours de congé) pour appuyer votre demande d’indemnisation.
Engagement non tenu et augmentation comme preuve implicite :
L’absence d’avenant ne vous prive pas automatiquement de recours. Un engagement oral réitéré, confirmé par des augmentations successives, l’évolution de vos missions, et la reconnaissance implicite de votre rôle de coordinateur peuvent constituer des éléments de preuve d’une promesse non tenue. Le juge prud’homal peut tenir compte de la bonne foi du salarié, de la chronologie des faits et de l’évolution réelle de vos responsabilités. Une action pour rupture de l’engagement moral ou comportement déloyal de l’employeur est recevable, même si elle n’aura pas forcément un poids aussi lourd qu’un avenant signé.
Durée de la situation et prescription :
Le délai de prescription en droit du travail est de 3 ans pour les salaires et 5 ans pour les autres litiges contractuels. Vous ne pourrez donc pas réclamer des indemnités salariales (ex. primes) remontant à plus de trois ans. En revanche, le caractère prolongé de votre mise à disposition non régularisée peut appuyer votre dossier et renforcer votre position : cela montre une négligence structurelle de l’employeur, que vous avez tenté de résoudre par le dialogue pendant plusieurs années.
En résumé, vous avez des fondements solides pour envisager une action devant les prud’hommes :
– pour mise à disposition illégale,
– pour non-respect des engagements managériaux,
– et pour préjudice financier lié à un traitement discriminatoire par rapport aux salariés de l’entreprise B.
Avant de vous lancer, je vous recommande de consulter un avocat spécialisé en droit du travail ou une permanence syndicale, afin d’établir un dossier chronologique détaillé, avec toutes les pièces utiles (bulletins de salaire, mails, entretiens, organigrammes, témoignages…). Vous pourriez également proposer une rupture conventionnelle avec indemnisation négociée en échange de votre renonciation à agir en justice, si cela vous semble préférable à un contentieux long.
Merci de bien vouloir confirmer que la question a été résolue en cliquant sur le bouton vert, s’il vous plaît
Merci, vous avez répondu à ma question.
Je m’orienterai bien entendu vers un avocat spécialisé si le besoin se fait sentir
il y a 1 mois