Bonjour,
Je comprends tout à fait que vous souhaitiez une vue d'ensemble de vos recours, surtout après avoir cliqué trop vite. Votre situation est effectivement délicate et la position de votre notaire semble contestable sur plusieurs points importants en droit des successions.
En droit français, pour garantir l'égalité entre les héritiers (les enfants sont des héritiers réservataires), les donations que l'un d'eux a reçues du défunt de son vivant sont en principe soumises au rapport à succession (article 843 du Code Civil).
Le but du rapport est de reconstituer fictivement le patrimoine du défunt au jour de son décès en y ajoutant la valeur des biens donnés. Cela permet de calculer la part de chacun, afin que l'héritier qui a déjà reçu compense les autres.
Sauf mention contraire explicite : Un don manuel est présumé fait "en avancement de part successorale" (c'est-à-dire une avance sur l'héritage). Il doit donc être rapporté. Pour qu'il ne le soit pas, il aurait fallu que le don soit expressément stipulé "hors part successorale" ou "par préciput et hors part", et ce, dans la limite de la quotité disponible (la part dont le défunt pouvait disposer librement, sans empiéter sur la réserve héréditaire des enfants).
La distinction "rapport fiscal" vs. "rapport civil" :
Votre notaire fait une distinction essentielle :
Rapport fiscal : Cela signifie que la donation a été déclarée au fisc, et que les droits de donation ont été payés (ou que la valeur a été prise en compte pour le calcul des droits de succession futurs). C'est une obligation fiscale.
Rapport civil : C'est l'obligation de l'héritier donataire de rapporter la valeur du don à la masse de l'héritage pour le calcul des parts de chacun et assurer l'égalité civile entre les cohéritiers.
Le notaire affirme que le rapport fiscal a été fait, mais pas le rapport civil. C'est là que réside le problème majeur. Le notaire a manqué à son devoir de conseil et à son rôle en ne tenant pas compte du rapport civil pour la répartition des fonds.
La répartition en 3 parts égales SANS tenir compte des dons manuels :
Cette répartition est incorrecte si les dons manuels étaient soumis au rapport civil (ce qui est la présomption légale pour des dons manuels non spécifiés "hors part").
La somme de la vente aurait dû être ventilée en tenant compte de ces dons, afin que l'héritier ayant déjà reçu moins (ou rien) touche une part plus importante sur la vente pour rétablir l'équilibre.
"S'arranger entre nous" et l'absence d'acte de partage :
Le notaire vous demandant de "vous arranger" est une faute professionnelle dans ce contexte. Son rôle est justement de procéder à un partage légal et équitable, en appliquant les règles de droit. Il ne peut pas se décharger de cette responsabilité sur les héritiers, surtout si la répartition qu'il a opérée est manifestement erronée au regard du droit.
L'absence d'acte de partage est logique si la vente est juste un premier pas. Le droit de partage de 2,5% n'est dû que lors de l'établissement de l'acte de partage définitif de l'ensemble de la succession (et non pas sur la simple vente d'un bien en indivision). Cependant, la distribution des fonds de la vente devrait préfigurer ce partage final.
Vos Recours et Ce que vous devez faire :
Absolument NON, vous ne devez pas accepter l'arrangement préconisé par le notaire si les faits sont tels que vous les décrivez. Accepter cette répartition reviendrait à valider une distribution inéquitable et vous placerait dans une situation très difficile pour récupérer votre dû.
Voici vos recours possibles :
Refuser la répartition proposée par le notaire :
Vous avez le droit de refuser la répartition des fonds si elle ne respecte pas les règles légales de la succession.
Ne signez aucun document qui entérinerait cette répartition inégale si elle est faite sur la base d'un calcul erroné.
Mettre en demeure le notaire (par LRAR) :
Adressez-lui une lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) pour contester formellement la répartition des fonds de la vente.
Rappelez-lui ses propres propos sur le "rapport fiscal" mais l'absence de "rapport civil".
Invoquez l'article 843 du Code Civil sur l'obligation de rapport des dons faits en avancement de part successorale pour garantir l'égalité des héritiers.
Demandez-lui de rectifier la répartition des fonds de la vente en tenant compte de la valeur des dons manuels (au jour du décès ou au jour du partage, selon les règles de calcul spécifiques des articles 860 et suivants du Code Civil).
Fixez-lui un délai raisonnable pour procéder à cette rectification (par exemple, 15 jours ou 3 semaines).
Précisez qu'à défaut, vous vous verrez contrainte de saisir d'autres voies de recours.
Consulter un autre notaire (pour un second avis) :
Il est crucial d'obtenir un avis indépendant. Prenez rendez-vous avec un autre notaire, en lui présentant l'intégralité du dossier de succession (inventaire, testaments éventuels, copies des déclarations de dons manuels, la facture de vente du bien, et les courriers de l'actuel notaire).
Ce nouveau notaire pourra confirmer si le calcul des parts est erroné et vous expliquer la répartition légale. Il pourra même, si vous le souhaitez, reprendre le dossier de succession.
Consulter un avocat spécialisé en droit des successions :
C'est la solution la plus robuste si le notaire actuel persiste dans son erreur ou refuse d'appliquer la loi.
L'avocat pourra analyser l'intégralité du dossier, confirmer vos droits et vous conseiller sur la meilleure stratégie :
Intervenir directement auprès du notaire actuel pour exiger le respect de la loi.
Engager une action en justice (devant le Tribunal Judiciaire) pour demander une liquidation-partage judiciaire de la succession si le partage amiable est impossible. C'est le juge qui ordonnera le rapport des donations et la répartition correcte des biens.
Éventuellement, si le préjudice est avéré et qu'il y a une faute caractérisée, engager la responsabilité professionnelle du notaire.
Conséquences d'une acceptation de la répartition incorrecte :
Perte financière : Vous perdriez la part qui vous revient de droit en raison des donations non rapportées.
Difficile de revenir en arrière : Une fois la somme acceptée et répartie "amiablement" de manière incorrecte, il sera beaucoup plus difficile de revenir sur cette répartition, car cela impliquerait que vous poursuiviez votre frère en justice pour qu'il vous restitue la somme qu'il a "trop perçue".
Votre notaire a une obligation de conseil et de diligence. Il doit veiller à l'équilibre et au respect de la loi dans le partage de la succession. La situation actuelle est en votre défaveur. N'hésitez pas à solliciter des avis extérieurs pour protéger vos droits.
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il y a 11 jours
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