Cher monsieur,
Non, une simple mise en demeure restée sans réponse n'est généralement pas considérée comme une tentative de conciliation amiable suffisante pour vous dispenser de l'étape du conciliateur de justice (ou autre mode de résolution amiable) si celle-ci est légalement obligatoire avant de saisir le tribunal.
Il convient de distinguer plusieurs points dans votre situation.
1. Le principe de la conciliation amiable préalable obligatoire
En France, pour de nombreux litiges civils (notamment ceux dont le montant est inférieur à 5 000 euros, et certains litiges spécifiques quelle que soit leur valeur, comme les litiges de voisinage ou ceux liés à l'exécution de certains contrats de consommation), l'article 750-1 du Code de Procédure Civile impose une tentative de résolution amiable préalable avant de pouvoir saisir le juge.
Les modes de résolution amiable visés par la loi sont :
La conciliation menée par un conciliateur de justice.
La médiation conventionnelle ou judiciaire.
La procédure participative.
2. Pourquoi la mise en demeure ne suffit pas
Une mise en demeure est une démarche unilatérale : c'est vous qui adressez une demande formelle à l'autre partie. Bien qu'elle témoigne de votre volonté de résoudre le litige à l'amiable et de votre bonne foi, elle ne répond pas aux critères de la "tentative de résolution amiable" exigée par la loi.
Absence de tiers impartial : La conciliation ou la médiation implique toujours l'intervention d'un tiers impartial et indépendant (le conciliateur de justice ou le médiateur) dont le rôle est de faciliter le dialogue, d'explorer les pistes de solution et de rapprocher les parties. La mise en demeure n'implique pas cette intervention tierce.
Formalisme légal : La loi a spécifiquement désigné les méthodes de résolution amiable qui sont acceptées. Une simple correspondance, même formelle comme la mise en demeure, n'en fait pas partie pour les litiges où cette étape est obligatoire.
3. Conséquences si l'étape est ignorée
Si vous saisissez le tribunal sans avoir effectué la tentative de conciliation amiable préalable lorsque celle-ci est obligatoire, le juge déclarera votre demande irrecevable. Cela signifie que votre affaire ne sera pas examinée sur le fond et que vous devrez recommencer la procédure en passant par l'étape de la conciliation. Cela vous ferait perdre du temps et potentiellement de l'argent.
4. L'exception possible (et nuancée) liée aux longs délais
Vous mentionnez des délais très longs pour obtenir un rendez-vous avec un conciliateur. C'est un point important.
La jurisprudence a admis que l'obligation de conciliation amiable puisse être écartée dans certains cas d'impossibilité matérielle d'y avoir recours. Cela peut inclure des situations où l'accès à un conciliateur de justice est objectivement impossible ou excessivement difficile dans des délais raisonnables, rendant la formalité trop lourde et dilatoire au regard de la situation.
Pour pouvoir invoquer cette impossibilité, vous devriez pouvoir le prouver au juge. Cela signifierait que vous auriez :
Effectué des démarches concrètes pour prendre rendez-vous avec un conciliateur (appels téléphoniques avec dates et noms, captures d'écran de tentatives de rendez-vous en ligne, courriers, etc.).
Obtenu des preuves (écrits, témoignages) que les délais d'attente sont effectivement de plusieurs mois ou qu'il n'y a pas de conciliateur disponible dans votre juridiction.
En pratique : Vous ne pouvez pas automatiquement zapper l'étape du conciliateur juste parce qu'une mise en demeure n'a pas abouti. Vous devrez démontrer au juge que vous avez tenté d'accéder à ce mode de résolution amiable et que cela s'est avéré impossible ou déraisonnablement long.
Que faire ?
Conservez la preuve de votre mise en demeure : C'est une bonne base pour montrer votre bonne foi.
Documentez vos tentatives de conciliation : Continuez de tenter d'obtenir un rendez-vous avec un conciliateur de justice (en gardant des traces de vos démarches et des réponses sur les délais).
Contactez une association de consommateurs : Elles connaissent bien les procédures et peuvent parfois accélérer les choses ou vous conseiller sur la meilleure stratégie à adopter face aux délais.
Consultez un avocat : Si les délais sont vraiment rédhibitoires et que vous souhaitez aller directement au tribunal, un avocat pourra vous conseiller sur la pertinence de cette démarche et sur la manière de présenter au juge l'argument de l'impossibilité de la conciliation amiable préalable. Il est le seul à pouvoir évaluer si votre situation est une de ces rares exceptions validées par les tribunaux.
En conclusion, votre mise en demeure est une bonne première étape mais ne remplace pas, en l'état actuel du droit et de sa pratique, la tentative de conciliation obligatoire.
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il y a 2 jours
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