Bonjour
Votre projet de transmission de votre maison est tout à fait réalisable pour vos enfants, mais l'intégration de votre amie avec une clause de loyer et de protection en cas d'incapacité soulève des points juridiques et fiscaux importants.
1. Donation de la nue-propriété à vos enfants avec réserve d'usufruit pour vous
C'est une opération classique et très courante :
Vous donnez la nue-propriété de votre maison à vos deux enfants. Ils deviennent propriétaires des murs, mais ne peuvent ni l'occuper ni en percevoir les loyers.
Vous conservez l'usufruit. Cela signifie que vous gardez le droit d'habiter la maison ou de la louer pour en percevoir les loyers, jusqu'à votre décès.
Cette donation est fiscalement avantageuse pour les enfants (abattements importants et droits de donation réduits sur la valeur de la nue-propriété).
2. Intégrer votre amie dans le dispositif : Les défis
C'est là que la situation se complexifie, car votre amie n'est ni pacsée ni mariée avec vous.
L'usufruit réversif (ou successif) pour votre amie :
Il est possible de prévoir dans l'acte de donation que, à votre décès, votre usufruit ne s'éteigne pas mais soit transmis à votre amie (on parle d'usufruit successif ou réversif).
Problème majeur : La fiscalité. Votre amie, n'étant pas votre conjoint ou votre partenaire de PACS, serait considérée comme une tierce personne par l'administration fiscale. Elle devrait payer des droits de succession de 60% sur la valeur de cet usufruit au moment de votre décès. C'est une charge fiscale très lourde qui rend souvent cette option impraticable pour les non-parents.
Le paiement d'un loyer : Si votre amie obtenait l'usufruit, elle ne paierait pas de "loyer" aux nus-propriétaires (vos enfants), car l'usufruit lui donne le droit de jouir du bien. Vous pourriez insérer une "charge" dans l'acte stipulant qu'elle verse une somme annuelle à vos enfants, mais cela ne changerait rien aux 60% de droits de succession qu'elle devrait payer pour acquérir cet usufruit.
Le droit d'usage et d'habitation (DUH) pour votre amie :
Alternative à l'usufruit, vous pourriez lui léguer par testament un simple droit d'usage et d'habitation (qui lui permettrait d'habiter la maison personnellement, mais pas de la louer par exemple).
Fiscalité : Ce droit serait également soumis aux 60% de droits de succession.
Le paiement d'un loyer après votre décès :
Si votre souhait est que votre amie puisse continuer à vivre dans la maison en payant un loyer à vos enfants après votre décès, cela relève d'une relation locative classique (bail).
Vous ne pouvez pas légalement imposer à vos enfants de signer un contrat de location avec votre amie après votre décès. Ce serait une décision qu'ils devraient prendre en tant que pleins propriétaires de la maison. Vous pouvez leur faire une recommandation par testament, mais pas une obligation légale.
3. La situation d'incapacité mentale
Pour prévoir une situation où vous seriez mentalement incapable de prendre des décisions, l'outil juridique adapté est le Mandat de protection future.
Vous pourriez désigner dans ce mandat une personne (votre amie, ou quelqu'un d'autre) pour gérer vos biens et votre personne en cas d'incapacité.
Le mandat pourrait contenir des directives concernant l'occupation de la maison par votre amie pendant votre incapacité (ex: elle continue d'y vivre gratuitement ou moyennant le paiement d'une contribution aux charges), mais cela ne lui conférerait pas de droit sur le bien après votre décès.
En résumé :
Donner la nue-propriété à vos enfants en vous réservant l'usufruit : C'est simple et efficace.
Pour votre amie :
Prévoir un usufruit ou un droit d'usage et d'habitation pour elle à votre décès est légalement possible mais fiscalement désastreux (60% de droits de succession). Le paiement d'un "loyer" serait une charge attachée à ce droit.
Prévoir qu'elle paye un loyer à vos enfants après votre décès relève d'un futur contrat de location que vous ne pouvez pas leur imposer.
Pour l'incapacité : Le Mandat de protection future est l'outil adéquat pour organiser la gestion de vos affaires, y compris l'occupation du logement, en cas d'incapacité.
Conseil crucial : Consultez un notaire
Compte tenu de la complexité de votre souhait et des lourdes implications fiscales pour votre amie, il est absolument indispensable de consulter un notaire. Il pourra :
Étudier précisément votre situation patrimoniale et familiale.
Vous expliquer les différentes options et leurs conséquences juridiques et fiscales détaillées.
Vous aider à choisir la meilleure stratégie pour atteindre vos objectifs tout en minimisant les coûts et les risques. Il existe parfois des solutions créatives mais elles nécessitent l'expertise d'un professionnel.
N'hésitez pas à poser toutes ces questions à votre notaire.
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