Chère madame,
Votre situation est effectivement frustrante et la raison invoquée par l'administration mérite d'être contestée. Le refus de naturalisation de votre mari pour le seul motif que ses ressources sont "d'origine belge" semble être une interprétation restrictive et potentiellement contestable du critère de "moyens d'existence suffisants et stables", surtout au vu de tous les éléments positifs de votre dossier.
Analyse de la situation au regard des critères de naturalisation
Pour obtenir la naturalisation par décret, plusieurs conditions doivent être remplies (articles 21-15 et suivants du Code civil) :
Résidence en France : Votre mari réside en France depuis 2015 sans interruption, soit 10 ans. C'est bien au-delà du minimum requis (généralement 5 ans).
Assimilation à la communauté française : L'entretien réussi, le fait qu'il soit intégré et que votre enfant soit scolarisé en France sont des preuves solides de cette assimilation (connaissance de la langue, de la culture, des valeurs de la République).
Bonnes mœurs et absence de condamnation pénale : Rien n'indique que ce soit un problème dans votre cas.
Moyens d'existence suffisants et stables : C'est le cœur du problème ici.
Le principe : La loi exige que le demandeur dispose de ressources qui lui permettent de subvenir à ses besoins et qui ne le mettent pas à la charge de la société française. Le montant doit être au moins égal au SMIC.
Votre situation : Votre mari a une retraite belge "bien plus élevée que le SMIC", il est propriétaire, et vous ne percevez pas d'allocations. Vous vivez et investissez en France. Ces éléments démontrent une autonomie financière certaine et une contribution à l'économie française (impôts, consommation, investissement immobilier).
L'origine des ressources et le "centre d'intérêt" : L'administration interprète parfois le critère des ressources en favorisant celles provenant d'une activité économique sur le sol français. Cependant, refuser la naturalisation à une personne avec une retraite substantielle d'un pays de l'Union Européenne, acquise après une longue carrière (43 ans !), simplement parce que cette retraite n'est pas "française", peut être considéré comme une interprétation abusive et potentiellement discriminatoire du critère. Le fait que la Belgique verse la retraite ne signifie en aucun cas que le "centre d'intérêt" de votre mari n'est pas en France, surtout s'il vit, s'intègre, possède un bien immobilier et a une famille scolarisée en France. C'est le lieu de vie et d'intégration qui prime, pas la provenance du compte bancaire d'origine de la pension.
N'est-ce pas discriminatoire ?
Légalement, la naturalisation est un acte de souveraineté. La France n'est pas tenue d'accorder la nationalité. Cependant, les motifs de refus doivent être légaux, proportionnés et non discriminatoires.
Refuser la naturalisation à une personne de 72 ans, intégrée, avec d'importantes ressources (même si d'origine étrangère mais de l'UE), propriétaire en France, ayant un enfant scolarisé, et résidant depuis 10 ans, en se basant uniquement sur la provenance de sa retraite, pourrait être considéré comme une décision disproportionnée et une application critiquable du critère des ressources. Cela pourrait frôler la discrimination sur l'origine des revenus plutôt que sur leur insuffisance ou instabilité.
Quels sont vos recours ?
Vous disposez de deux types de recours, à exercer dans des délais stricts :
Le recours gracieux ou hiérarchique (obligatoire avant le recours contentieux) :
Délai : Vous avez deux mois à compter de la notification du refus pour adresser un recours argumenté au Ministre de l'Intérieur.
Contenu : C'est le moment de détailler tous les éléments positifs que vous avez mentionnés :
Le montant de la retraite (précisez-le) bien supérieur au SMIC.
La preuve qu'il est propriétaire en France.
Le fait qu'il paie ses impôts en France et n'est pas à la charge de l'État.
Sa présence ininterrompue depuis 2015.
L'intégration réussie (entretien, vie sociale, participation à la vie locale si applicable).
La scolarisation de votre enfant en France.
Contestez explicitement l'idée que son "centre d'intérêt" soit hors de France en détaillant son mode de vie et ses investissements sur le territoire.
Forme : Envoyez ce recours par lettre recommandée avec accusé de réception.
Le recours contentieux devant le Tribunal Administratif :
Délai : Si le recours hiérarchique est rejeté explicitement, ou s'il n'y a pas de réponse dans un délai de quatre mois (ce qui équivaut à un rejet implicite), vous disposez alors de deux mois supplémentaires pour saisir le Tribunal Administratif du lieu de votre résidence.
Nécessité d'un avocat : Pour cette étape, il est fortement recommandé de faire appel à un avocat spécialisé en droit des étrangers et de la nationalité. Il saura formuler les arguments juridiques les plus pertinents et contester la décision de l'administration sur le terrain de l'erreur manifeste d'appréciation ou de la disproportion.
Que faire maintenant ?
Ne tardez pas : Le délai de deux mois pour le recours hiérarchique est crucial.
Préparez votre dossier : Rassemblez toutes les preuves des arguments que vous avancerez (relevés de pension, avis d'imposition français, acte de propriété, certificat de scolarité de l'enfant, etc.).
Rédigez un recours hiérarchique détaillé : Expliquez clairement et calmement pourquoi le motif de refus est infondé et pourquoi votre mari remplit toutes les conditions d'intégration et d'autonomie financière en France.
Votre situation présente de nombreux atouts pour contester ce refus. L'argumentation autour de la provenance des ressources, face à des revenus substantiels et une forte intégration, est un point sur lequel les tribunaux administratifs peuvent parfois invalider les décisions de l'administration.
Bon courage dans vos démarches.
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il y a 1 heure
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