Bonjour,
Je suis français vivant en Tunisie depuis 10 ans. J'ai divorcé en 2011 et me suis remarié depuis. J'ai deux enfants majeurs issus de ma première union, et viens d'avoir une petite fille (née le 31/08/2016) avec ma seconde épouse. Sur la base de ce changement de situation familiale et de mes nouvelles conditions professionnelles (CDD local avec une société tunisienne), j'ai demandé la révision du montant de la pension alimentaire (actuellement 2 enfants x 800 euros/enfant **)
Ma demande de révision vient d'être rejetée(*) . En toute objectivité, la décision du juge ne repose sur aucun fondement tangible, simplement sur des présomptions non fondées, et ce malgré tous les justificatifs fournis par mon avocate ("....pourquoi vivre en Tunisie si les salaires sont aussi bas ? ...dissimulation de son salaire et de ses ressources....sa femme ne travaillerait pas...et serait prétendument enceinte...."). Lorsque j'ai reçu la décision du juge, j'ai lu un document à charge contre moi ,et imprégné de forts soupçons de culpabilité. Je persiste à penser que personne ne s'est vraiment donné la peine de consulter les pièces du dossier et que la conclusion a été rendue à l'emporte pièce. Je suis écœuré car je trouve cette décision injuste, mais je ne souhaite pas en rester là.
Je souhaite contester cette décision abusive. Quels sont, selon vous, les recours possibles ?
Dans l'attente de vous lire, je vous prie d'agréer, Maître, mes plus sincère salutations.
M. LAUTRU
(*) Je peux vous adresser la décision du juge si vous le souhaitez.
(**) Au début de la procédure de divorce, j'ai proposé à mon ex-épouse, sur conseil de mon avocat, une pension alimentaire de 800 Euros par enfant . A cette époque, je travaillais pour un grand groupe (VEOLIA). Je pensais bien faire dans l'intérêt de mes enfants. Malheureusement, aujourd'hui, je n'ai plus ce travail et suis contraint d'accepter d'autres postes avec moins de revenus .
Voici la décision du juge
Voici une copie de la décision
Date de clôture de l’instruction : 09 Juin 2016
Date des plaidoiries tenues en chambre du conseil: 24 Novembre 2016
Date de mise à disposition : 17 Janvier 2017
Audience présidée par Florence PAPIN, magistrat rapporteur, sans opposition
des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré,
assistée pendant les débats de Géraldine BONNEVILLE, greffier.
Composition de la Cour lors du délibéré :
- Florence PAPIN, conseiller faisant fonction de président
- Michèle JAILLET, conseiller
- Véronique GANDOLIERE, conseiller
Arrêt Contradictoire rendu en Chambre du Conseil par mise à disposition au
greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans
les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Florence PAPIN, conseiller faisant fonction de président, et par
Géraldine BONNEVILLE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat
signataire.
* * * * *
EXPOSE DU LITIGE
Madame CHEVALIER et Monsieur LAUTRU ont contracté mariage le 27
juin 1998 à Equeurdreville Hainneville, sans contrat de mariage préalable.
De leur union sont issus deux enfants :
- Eddie, né le 26 novembre 1995 à Cherbourg (Manche),
- Fanny, née le 5 août 1998, à Cherbourg (Manche).
Par jugement du 23 septembre 2010, le juge aux affaires familiales du
tribunal de grande instance de LYON a prononcé le
divorce des époux sur le
fondement de l’article 233 du code civil ainsi que la dissolution du régime
matrimonial ayant existé entre les époux et condamné Monsieur LAUTRU au
paiement d’une prestation compensatoire de 50 000 € au profit de son épouse.
S’agissant des enfants, le jugement a constaté que les parents
exerçaient en commun l’autorité parentale à leur égard, fixé leur résidence
habituelle chez la mère, accordé un droit de visite et d’hébergement au
père pendant la moitié des vacances scolaires de plus de cinq jours (la
première moitié les années paires et la deuxième moitié les années impaires)
et fixé la contribution à l’entretien et l’éducation des enfants à la charge du
père à la somme de 1 600 € par mois, soit 800 € pour chacun des deux
enfants.
Par assignation en la forme des référés du 9 juin 2015, Monsieur
LAUTRU a saisi le juge aux affaires familiales afin de voir diminuer la
contribution à l’entretien et l’éducation des enfants mise à sa charge par le
jugement du 23 septembre 2010 et la fixer à la somme de 50 € par enfant,
compte-tenu de sa situation financière et personnelle.
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Par ordonnance du 24 juillet 2015, le juge aux affaires familiales du
tribunal de grande instance de LYON a débouté Monsieur LAUTRU de sa
demande.
Par déclaration reçue le12 août 2015, Monsieur LAUTRU a interjeté
appel total de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 24 novembre 2016,
il demande à la cour de :
- Rejeter les ”arguties“ de Madame CHEVALIER,
- La débouter de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions pour
défaut de preuve et “non fondement”,
Infirmant l’ordonnance rendue par le juge aux affaires familiales du
tribunal de grande instance de LYON prononcée le 24 juillet 2015 en toutes
ses dispositions :
- Constater qu’ Eddie est désormais majeur,
- Constater qu’il ne peut matériellement et en l’état, verser une pension
alimentaire au titre de la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants,
- Constater qu’il n’est pas établi qu’Eddie, désormais majeur, demeure
à la charge principale de Madame CHEVALIER,
En conséquence,
À titre Principal,
-Dire et juger qu’il est dispensé, en l’état, de verser une pension
alimentaire au titre de la contribution à l’entretien et l’éducation des enfants,
jusqu’à ce qu’il revienne à meilleure fortune,
À titre subsidiaire,
- Fixer à la somme de 300 € le montant de sa contribution pour l’entretien
et l’éducation de l’enfant Fanny LAUTRU, née le 5 août 1998, seul enfant
encore mineur, tant qu’il sera justifié par l’intimée qu’elle reste à sa charge,
celle-ci ne justifiant pas qu’Eddie, désormais majeur, demeure à sa charge
principale.
En tout état de cause
- Lui donner acte qu’il s’engage à s’acquitter de toute dette afférente à
sa contribution à l’éducation des enfants - après décompte réel et vérifié par les
parties - au moment de la liquidation du régime matrimonial ayant existé entre
les époux,
- Condamner Madame CHEVALIER à lui verser la somme de 3 000 € au
titre de l'article 700 du Code de procédure civile
- Condamner Madame CHEVALIER aux entiers dépens d'instance et
d'appel, ces derniers étant distraits au profit de la SELARL LAFFLY & Associés,
Avocat, sur son affirmation de droit.
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Par conclusions notifiées le 13 mai 2016, Madame CHEVALIER demande
à la cour de :
-Dire et juger l’appel de l’ordonnance du 24 juillet 2015 de Monsieur
Frédéric LAUTRU comme irrecevable et mal fondé, celui-ci ne justifiant
pas de son impécuniosité
-Débouter Monsieur Frédéric LAUTRU de toutes fins et conclusions
contraires aux présentes,
-Constater que l’autorité parentale à l’égard de l’enfant mineure commun
Fanny LAUTRU est exercée conjointement par les parents,
-Confirmer le jugement du 23 septembre 2010 en ce qu’il a fixé la
contribution à l’entretien et l’éducation des enfants mise à la charge de
Monsieur Frédéric LAUTRU, à la somme de 800 Euros par mois et par enfant,
soit au total 1.600 Euros mensuels
Condamner Monsieur Frédéric LAUTRU à lui verser la somme de
3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Condamner Monsieur Frédéric LAUTRU aux entiers dépens de l’instance
distraits au profit de Maître LEGRAS, Avocat sur son affirmation de droit.
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure
civile il est expressément renvoyé pour les faits, prétentions et arguments des
parties aux conclusions récapitulatives déposées.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 9 juin 2016, l’affaire a été
évoquée le 24 novembre 2016 et mise en délibéré ce jour.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l‘étendue de la saisine
Attendu qu’il convient de rappeler que, l’appel ayant été formalisé après
le 1 janvier 2011, date d’entrée en vigueur de l’article 954 du code de er
procédure civile, modifié par l’article 11 du décret n° 2009-1524 du 9 décembre
2009, lui même complété par l ‘article 14 du décret 2010-1647 du 28 décembre
2010, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif ;
Attendu que ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du
code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir “constater” ou
“donner acte” ;
Attendu que ne relève pas de la compétence de la cour d’appel statuant
au fond, la question de la recevabilité de l’appel laquelle relève de la
compétence exclusive du juge de la mise en état hormis le cas où la cause
d’irrecevabilité survienne ou soit révélée postérieurement à son
dessaisissement en application des dispositions de l’article 914 du code de
procédure civile,
Que par ailleurs l’effet dévolutif de l’appel implique que la cour connaisse
des faits survenus au cours de l’instance d’appel et depuis le jugement déféré
et statue sur tous les éléments qui lui sont produits même s’ils ne se sont
révélés à la connaissance des parties qu’en cours d’instance d’appel ;
Attendu que l’appelant remet en cause l‘intégralité de la décision déférée,
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Sur la pension alimentaire
Attendu que l’article 373-2-2 du code civil prévoit qu’en cas de séparation
des parents la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants communs
prend la forme d’une pension alimentaire versée par l’un des parents à l’autre.
Que cette pension alimentaire au regard des dispositions de l’article
371-2 est fixée en fonction des ressources de chacun des parents et des
besoins de l’enfant,
Attendu que tandis que l’appelant fait valoir que sa situation financière
s’est dégradée, Madame CHEVALIER soutient qu’il organise son insolvabilité,
Attendu que la pension alimentaire pour les deux enfants a été fixée à la
somme totale de 1600 € depuis le 22 septembre 2008, date de l’ordonnance sur
tentative de conciliation, les revenus pris en compte pour Monsieur LAUTRU
s’élevant à 3000 € et ceux de Madame Chevalier à 1150 €,
Attendu qu’il résulte de la décision du premier juge que l’appelant, âgé
de 48 ans,a perçu jusqu’au 19 décembre 2014 un salaire de 6940 € par mois
puis qu’il aurait connu une période de chômage dont il ne justifie pas devant la
cour,
Attendu qu’il résulte de la pièce 6 de Madame CHEVALIER qu’il a été ces
dernières années chef de projet en Chine, directeur de réalisation en Algérie,
directeur d’agence en Algérie, gérant consultant et enfin directeur d’exploitation
et de centre de profit dans le cadre du groupe PIZZORNO,
Attendu que l’appelant, produit un contrat à durée déterminée de un an
en date du 1 septembre 2015 en qualité d’ingénieur conseil à Tunis ainsi que er
deux fiches de paye mentionnant un salaire de 5000 dinars, nets d’impôt soit
2030,04 euros, qu ‘il perçoit un 13ème mois et une prime annuelle selon la
notation et les résultats en fin d’année, qu’il s’acquitte d’un loyer mensuel de
2110 dinars,
Attendu qu’il ne précise pas à la cour l’intérêt pour lui de s’expatrier en
Tunisie si les conditions financières sont aussi défavorables qu’il l’expose, ce
qui accrédite la thèse de l‘intimée d’une dissimulation au moins partielle de ses
revenus,
Attendu que Madame CHEVALIER allègue sans être contredite que son
époux a perçu lors de la rupture de son contrat de travail une indemnité de
rupture conventionnelle de 27 216 € au titre de ses congés payés ainsi que
10 200 € au titre de l’indemnité de rupture,
Attendu qu’il s’est remarié et que son épouse ne travaillerait pas et
attend un enfant,
Attendu qu’Eddy est âgé de 21 ans, qu’il poursuivait durant l’année
scolaire 2015/ 2016 et à la date de la clôture de la procédure, le 9 juin 2016,
une scolarité dans les métiers de la montagne pour devenir moniteur de ski d’un
coût annuel de 2859 €,
Attendu que Madame CHEVALIER justifie de nombreux frais pour son fils
aîné liés notamment à ses stages nécessitant des frais d’hébergement et de
transport, à un traitement d’orthodontie, à des séjours linguistiques et au
passage de son permis de conduire,
Attendu que Fanny, qui est âgée de 18 ans depuis le mois d’août, était
scolarisée en 2015 /2016 en terminale scientifique en internat, que Madame
CHEVALIER justifie de nombreux frais pour sa fille : soutien scolaire,
psychologue, frais d’orthodontie, séjours à l’étranger, que Monsieur LAUTRU
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ne conteste pas qu’elle soit toujours à la charge de sa mère,
Attendu que Madame CHEVALIER est formatrice en français et occupe
des emplois à durée déterminée en fonction des besoins du centre de formation
connaissant durant l’été des périodes de chômage et percevant en complément
l’allocation aide au retour à l’ emploi, qu’elle justifie de revenus mensuels de
l’ordre de 1300 € en 2016 auxquels s’ajoutent des revenus fonciers de 710 €
soit un revenu mensuel de 2010 €,
Attendu qu’elle soutient sans être contredite que le père n’entretient
aucune relation avec ses enfants ce qui ne lui occasionne donc aucun frais,
Attendu qu’il y a lieu au vu de ces éléments, de la situation respective
des parties et des besoins des enfants, de maintenir la pension alimentaire due
par Monsieur LAUTRU pour ses deux enfants et dès lors de confirmer la
décision déférée,
sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Attendu que Monsieur LAUTRU est condamné aux dépens d’appel
recouvrés avec distraction au profit du conseil de la partie adverse et à payer
à Madame CHEVALIER la somme de 1200 € au titre de l’article 700 du code de
procédure civile,
PAR CES MOTIFS
La cour
après débats en chambre du conseil, après en avoir délibéré, statuant
contradictoirement et en dernier ressort
Se déclare incompétente pour statuer sur la recevabilité de l ‘appel,
Confirme en toutes ses dispositions la décision entreprise,
Condamne Monsieur LAUTRU aux dépens d’appel qui seront recouvrés
avec distraction au profit du représentant de la partie adverse conformément
,
aux dispositions de l ‘article 699 du code de procédure civile
Condamne Monsieur LAUTRU à payer à Madame CHEVALIER la somme
de 1200 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les
parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au
deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signé par madame Florence PAPIN, conseiller faisant fonction de
président et par madame Géraldine BONNEVILLE, greffier, auquel la minute
de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président
Merci de vos réponses