Bonjour,
Votre question est très pertinente et touche à des points cruciaux du droit des obligations et des successions, notamment la notion de condamnation in solidum.
Voici comment les indemnités devraient être réparties et le rôle de la succession :
1. La condamnation "in solidum" : ce que ça signifie
Quand deux personnes sont condamnées "in solidum", cela signifie que la victime (la partie civile) peut demander le paiement de l'intégralité de la dette à n'importe lequel des co-condamnés.
La victime n'est pas obligée de diviser sa demande. Elle peut réclamer la totalité à l'un ou à l'autre, ou à chacun une partie, comme bon lui semble.
L'objectif de l'in solidum est de garantir à la victime qu'elle sera indemnisée, même si l'un des condamnés est insolvable.
2. Le décès de l'un des condamnés et la succession
Lorsqu'une personne condamnée in solidum décède, sa dette ne disparaît pas. Elle est transmise à ses héritiers, mais avec des spécificités importantes.
La dette est transmise aux héritiers : L'épouse et les trois enfants, en tant qu'héritiers potentiels, sont susceptibles de devoir cette dette.
Absence de succession faite : Le fait qu'aucune succession n'ait été "faite" (c'est-à-dire qu'elle n'ait pas été formellement liquidée et partagée chez un notaire) ne change rien au principe de la transmission de la dette. La dette existe dès le décès de la personne.
Cependant, tant que la succession n'est pas acceptée par les héritiers, ou qu'elle est acceptée à concurrence de l'actif net, les créanciers ne peuvent pas saisir directement les biens personnels des héritiers. Ils ne peuvent saisir que les biens de la succession.
Si les héritiers ont renoncé à la succession, ils ne sont pas tenus des dettes du défunt. C'est un point crucial à vérifier.
Attraction de l'épouse et des enfants : La partie adverse a agi correctement en se retournant contre les ayants droit du défunt. Ils sont désormais les débiteurs de cette partie de la dette.
3. Comment les indemnités sont-elles réparties "au départ" ?
C'est là qu'il faut distinguer entre l'obligation à la dette (vis-à-vis de la victime) et la contribution à la dette (entre les co-condamnés).
Obligation à la dette (vis-à-vis de la victime) :
Non, les indemnités ne sont pas divisées par 5 (ni par 2 au départ pour l'auteur et les ayants droit).
La partie civile peut réclamer l'intégralité de la somme à l'autre condamné (l'auteur survivant).
OU la partie civile peut réclamer l'intégralité de la somme aux ayants droit du condamné décédé (c'est-à-dire qu'elle peut demander la totalité à l'épouse, ou à l'un des enfants, ou à eux tous conjointement, selon son choix).
L'in solidum est une garantie pour la victime : elle veut être payée, peu importe qui paie.
Contribution à la dette (entre les co-condamnés et les héritiers) :
C'est seulement après que la victime a été intégralement payée par l'un des débiteurs (ou un groupe de débiteurs) que celui-ci peut se retourner contre les autres pour leur part contributive. C'est ce qu'on appelle l'action récursoire.
Dans votre cas, si l'auteur survivant paie la totalité des indemnités à la partie civile, il pourra ensuite se retourner contre les ayants droit de la personne décédée pour récupérer la part de la dette qui incombait au défunt.
La répartition de cette part contributive se fait généralement par moitié si le jugement n'a pas précisé de clé de répartition, ou selon la part de responsabilité fixée par le juge. Donc, si le jugement n'a pas précisé la répartition entre les deux condamnés, ce sera moitié-moitié (50% pour l'auteur survivant, et 50% pour la succession du défunt).
Si la succession du défunt doit 50% de l'indemnité, et qu'il y a une épouse et trois enfants qui ont accepté la succession, cette part de 50% sera alors divisée entre eux (selon les règles de la succession et l'acceptation ou non de celle-ci). Par exemple, si l'épouse et les trois enfants sont les héritiers et qu'ils acceptent la succession purement et simplement, ils seront tenus de cette part de 50% sur l'ensemble de leur patrimoine (y compris personnel), au prorata de leurs droits successoraux respectifs (par exemple, un quart chacun si l'épouse opte pour l'usufruit et les enfants la nue-propriété, ou selon d'autres règles de partage de la succession).
Ce qui va se passer concrètement :
La partie civile va chercher à être payée le plus facilement possible. Elle se tournera probablement vers celui qui semble le plus solvable (l'auteur survivant OU l'épouse/les enfants s'ils ont un patrimoine identifié).
Si la succession n'est pas faite, la partie civile peut avoir des difficultés à se faire payer directement par les héritiers si ces derniers ne s'organisent pas. Elle pourrait devoir engager une procédure pour faire liquider la succession ou pour obtenir une reconnaissance de leur qualité d'héritiers s'ils ne collaborent pas.
C'est bien l'auteur survivant qui, s'il paie la totalité, se retournera ensuite contre les ayants droit du défunt pour la moitié de la somme. C'est à ce moment-là que la question de la liquidation de la succession et des parts de chacun des héritiers deviendra primordiale entre eux.
Votre préoccupation est donc légitime : pour la partie civile, la division n'est pas automatique au départ. Pour les ayants droit, leur engagement dépendra de l'acceptation de la succession et des modalités de cette acceptation.
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