Cher Monsieur,
Oui, vous pouvez tout à fait intenter une procédure pour harcèlement moral même si votre employeur a déjà été condamné pour manquement à son obligation de sécurité, et ce, même s'il s'agit des mêmes faits et de la même période.
Voici pourquoi et comment cela fonctionne :
Distinction entre l'obligation de sécurité et le harcèlement moral
C'est un point très important en droit du travail, confirmé par la jurisprudence de la Cour de cassation (notamment par un arrêt du 6 décembre 2017, n° 16-10.886, ou plus récemment le 8 janvier 2025, n°23-19.996) :
Manquement à l'obligation de sécurité (article L. 4121-1 du Code du travail) :
L'employeur a une obligation de résultat d'assurer la sécurité et de protéger la santé physique et mentale de ses salariés. Cela signifie qu'il doit prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir les risques professionnels, y compris les risques psychosociaux. S'il n'a pas mis en place les mesures de prévention adéquates ou s'il n'a pas réagi efficacement après avoir été informé d'une situation de souffrance au travail, il peut être condamné pour manquement à cette obligation. Cette condamnation porte sur le fait que l'employeur n'a pas pris les mesures suffisantes pour prévenir ou faire cesser une situation, qu'elle soit ou non qualifiée de harcèlement moral.
Harcèlement moral (article L. 1152-1 du Code du travail) :
Le harcèlement moral, lui, se caractérise par des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Il s'agit de la nature même des agissements subis par le salarié.
Ces deux notions sont distinctes et ne se confondent pas :
Un employeur peut être condamné pour manquement à son obligation de sécurité même s'il n'y a pas eu de harcèlement moral caractérisé (par exemple, il y a eu une situation de mal-être qu'il n'a pas gérée).
À l'inverse, il peut y avoir harcèlement moral sans que l'employeur ait pu éviter les agissements, mais il reste responsable du fait que ces agissements aient eu lieu.
Souvent, les deux sont liés : si un salarié est victime de harcèlement moral, l'employeur, s'il n'a pas pris toutes les mesures pour le prévenir ou y mettre fin, manquera aussi à son obligation de sécurité.
L'autorité de la chose jugée
Le principe de l'autorité de la chose jugée signifie que l'on ne peut pas juger deux fois la même affaire entre les mêmes parties, pour la même cause et sur le même objet.
Cependant, comme l'obligation de sécurité et le harcèlement moral sont des fondements juridiques distincts, même s'ils reposent sur des faits similaires et la même période, une condamnation pour l'un ne fait pas obstacle à une action pour l'autre.
Si le premier jugement a statué uniquement sur le manquement à l'obligation de sécurité, il n'a pas jugé de manière définitive la question de l'existence du harcèlement moral en tant que tel.
Vous pouvez donc engager une nouvelle procédure spécifiquement pour faire reconnaître le harcèlement moral et obtenir une indemnisation distincte pour ce préjudice. Le préjudice résultant du manquement à l'obligation de sécurité n'est pas forcément le même que celui résultant du harcèlement moral.
Que devez-vous faire ?
Rassemblez toutes les preuves : Témoignages, e-mails, courriers, certificats médicaux, arrêts de travail, compte-rendu de vos alertes à l'employeur, etc. Le harcèlement moral repose sur des faits précis et répétés.
Analysez le premier jugement : Vérifiez précisément ce que le jugement a statué. A-t-il expressément rejeté la qualification de harcèlement moral ? Ou s'est-il contenté de ne retenir que le manquement à l'obligation de sécurité sans se prononcer sur le harcèlement ? Si le harcèlement moral n'a pas été jugé ou a été mal instruit, votre dossier est solide.
Consultez un avocat spécialisé en droit du travail : C'est indispensable. Lui seul pourra analyser en détail le jugement précédent et les faits nouveaux (ou réanalysés) pour évaluer la recevabilité de votre demande et maximiser vos chances de succès. Il vous aidera à construire votre dossier et à présenter les faits sous l'angle du harcèlement moral.
En conclusion, vous avez de bonnes chances de pouvoir intenter cette procédure. La jurisprudence reconnaît bien la distinction entre ces deux obligations de l'employeur.
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il y a 21 heures
Bonjour,
Je vous remercie d’indiquer si j’ai répondu à votre question en cliquant sur le bouton vert de ma réponse.
Bien à vous
il y a 7 heures
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