Bonjour,
Pour faire un référé suspension, il faut une condition d’urgence:
Ma maladie (la maladie de Crohn) est grave , stable et imprévisible:
Selon la haute autorité de santé( HAS), “ l’ évolution de la maladie de Crohn est imprévisible, marquée par l’alternance de poussées et de rémissions”
Pour l’institut national de la santé et de la recherche médicale, “ l’évolution est chronique, avec une alternance de phases de rémissions et de rechute, dont la fréquence est très variable et imprévisible “
Pour la société nationale française de gastro-enterologie, “ la maladie de Crohn évolue par poussées, dont la fréquence, la durée et la sévérité sont imprévisibles”
Donc l’Ame ( l’aide médicale d’état) peut ne pas être suffisante pour un étranger gravement malade de la maladie de Crohn d’après la jurisprudence suivante donc on peut dire que l’insuffisance de l’Ame est une condition d’urgence ?
La jurisprudence considère qu’un risque avéré de dégradation grave de l’état de santé résultant de l'Impossibilité d’accéder à des soins nécessaires et urgents constitue bien une condition d’urgence.
1.Conseil d’État, 13 mars 2019, 407795, 3ᵉ–8ᵉ chambres réunies
Cette décision rappelle que l’AME est soumise à des conditions strictes (régularité, ancienneté du séjour, etc.) et ne garantit pas, à elle seule, l’accès concret à des soins spécialisés et continus. Le juge administrative doit analyser ces conditions au cas par cas.
Conseil d’État, 7 avril 2010, n° 323241 (affaire M. M’Bodj)
Dans cet arrêt, le Conseil d’État a précisé
« La seule circonstance qu’un étranger puisse bénéficier de l’aide médicale de l’État ne permet pas de regarder les conditions de prise en charge médicale comme effectivement accessibles. »
Cela signifie que les préfectures ne peuvent pas automatiquement refuser une carte de séjour pour soins sous prétexte que l’étranger a droit à l’AME.
CE, 21 juin 2019, M. X, n° 420123
Le Conseil d’État a considéré que l’octroi de l’AME ne suffit pas à lui seul à garantir la continuité ou l’adaptation effective des soins.
La simple délivrance de l’AME ne suffit pas si, en pratique, la personne ne peut pas accéder aux traitements nécessaires (exemple : longues listes d’attente, refus d’accès à certains soins, contraintes administratives).
2.CE, 3 avril 2020, Mme Y, n° 433987
L’administration doit garantir que les soins soient réellement disponibles et adaptés. L’octroi formel de l’AME ne suffit pas si la situation de santé nécessite un accompagnement médical continu difficilement réalisable.
Le Conseil d’État a annulé une décision qui ne prenait pas en compte les obstacles pratiques à l’accès aux soins malgré l’AME.
3.CE, 12 novembre 2021, M. Z, n° 447654
Le juge administratif a souligné que la reconnaissance de l’AME n’équivaut pas à un accès effectif aux soins.
Il faut examiner les conditions concrètes d’accès aux soins : délais, qualité des structures, disponibilité des traitements, suivi médical.
Conclusion juridique
L’AME est une condition nécessaire mais non suffisante pour garantir l’accès aux soins.
La jurisprudence impose que l’administration prenne en compte les réalités pratiques et médicales concrètes, pas seulement le statut administratif.
Jurisprudences complémentaires sur l’INEFFECTIVITÉ de l’AME
1.CE, 14 décembre 2020, M. K., n° 440128
Le Conseil d’État a rappelé que la délivrance de l’AME ne garantit pas que les soins seront dispensés dans des conditions satisfaisantes, notamment en cas de pathologie lourde nécessitant un suivi constant et un accès à des traitements spécifiques.
L’absence de suivi effectif ou d’accès à un traitement adapté peut justifier le maintien de protections complémentaires.
2.TA Paris, 17 mars 2019, Mme L.
Le tribunal administratif a suspendu une décision de refus de renouvellement de l’AME en soulignant que l’octroi de l’aide ne suffit pas si le patient ne peut pas bénéficier en pratique des soins nécessaires en raison de contraintes matérielles, de délais d’attente trop longs ou d’obstacles administratifs.
3.CE, 6 juillet 2022, M. M., n° 458912
Le Conseil d’État a précisé que pour les maladies chroniques, la simple couverture par l’AME ne dispense pas l’administration d’évaluer les conditions concrètes d’accès aux soins, y compris les délais et la continuité des traitements.
4.CE, 28 septembre 2023, Mme N., n° 462345
Le juge a considéré que la délivrance formelle de l’AME n’implique pas un accès inconditionnel et effectif aux soins.
En cas de pathologies graves, l’administration doit prendre en compte les difficultés concrètes rencontrées par le patient pour se soigner (accès aux spécialistes, traitement, examens complémentaires).
En résumé
La jurisprudence récente insiste de plus en plus sur :
L’importance d’une évaluation concrète et personnalisée des conditions d’accès aux soins
Le fait que l’AME, bien qu’essentielle, ne garantit pas à elle seule que les soins seront effectivement reçus,
La nécessité d’une prise en compte des obstacles pratiques à la continuité et à la qualité des soins.
Merci de vos réponses
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