Votre situation met en jeu trois niveaux de règles qui s’articulent :
le mandat donné par le juge à l’administrateur provisoire,
les pouvoirs d’un gérant (ou mandataire) dans une SCI,
la force obligatoire des statuts.
Voici les points clés à examiner :
1. Étendue des pouvoirs d’un administrateur provisoire
Un administrateur provisoire est nommé par le juge pour sauvegarder l’intérêt social et gérer la société pendant une crise (blocage, mésentente grave…).
Lorsque l’ordonnance se limite à « représenter, administrer et gérer la société », il dispose en principe des pouvoirs les plus larges du gérant, mais pas plus.
Article 1988 du Code civil : un mandataire n’a que les pouvoirs qui lui sont donnés, et il doit agir dans les limites de sa mission.
Jurisprudence constante : il ne peut accomplir que les actes nécessaires à l’administration courante ou à la sauvegarde de la société, sauf précision contraire de l’ordonnance (Cass. com., 6 déc. 2011, n° 10-21.545).
2. Conflit entre ses décisions et les statuts
Les statuts d’une SCI ont une force obligatoire entre associés (art. 1103 C. civ.) et priment sur des décisions unilatérales, y compris d’un gérant, sauf décision de justice contraire.
La Cass. civ. 3, 25 avril 2007, n° 06-11.833 que vous citez confirme qu’un gérant ne peut pas aller à l’encontre d’une clause statutaire sans décision unanime des associés si les statuts l’exigent.
Si les statuts prévoient expressément « l’attribution gratuite en jouissance » aux associés pour les locaux qu’ils occupent, cela constitue une disposition statutaire contraignante.
Un administrateur provisoire n’est pas autorisé, sauf mention expresse dans sa mission, à modifier ou neutraliser une clause statutaire.
3. Action judiciaire contre un associé
L’administrateur provisoire peut, comme le gérant, engager des actions judiciaires dans l’intérêt de la SCI (art. 1849 C. civ.), mais uniquement dans le respect des statuts.
L’art. 1848 C. civ. que vous citez est clair : les décisions qui excèdent les pouvoirs du gérant (et donc de l’administrateur provisoire par assimilation) nécessitent une décision des associés selon les statuts.
Si l’action intentée a pour effet de remettre en cause un droit conféré par les statuts (attribution gratuite en jouissance), elle pourrait être qualifiée d’acte excédant l’administration courante et donc être contestée.
4. L’argument du « bail verbal »
Le simple usage du mot « loyers » dans une ventilation comptable ou pour la déclaration 2072 ne suffit pas à établir l’existence d’un bail verbal, surtout si les statuts stipulent l’usage gratuit.
Un bail verbal supposerait la preuve d’un accord de volonté sur une location et sur un prix, distincte des simples écritures comptables à visée fiscale.
5. Stratégie possible pour vous
Vérifier l’ordonnance de désignation : y a-t-il une mention explicite lui permettant de déroger aux statuts ?
Si non, vous pouvez contester son action en invoquant :
Le dépassement de mission (art. 1988 C. civ. + art. 1848 C. civ.)
La violation des statuts (force obligatoire, Cass. 3e civ., 25 avril 2007)
L’absence de preuve d’un bail verbal.
Cette contestation se fait dans le cadre de la procédure engagée contre vous, en soulevant l’exception d’incompétence / dépassement de mandat de l’administrateur.
il y a 1 jour
Bonjour,
Je vous remercie d’indiquer si j’ai répondu à votre question en cliquant sur le bouton vert de ma réponse.
Bien à vous
il y a 8 heures
Merci, vous avez répondu à ma question.
Votre analyse est très professionnelle.
Je me documente depuis plusieurs mois en recherche d'un avocat.
il y a 7 heures
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